Interventions médicales pour hémorroïdes

À l’intérieur des parois du canal anal se trouvent trois sections principales ayant l’aspect de coussinets qui contiennent des vaisseaux sanguins de forme irrégulière, du tissu conjonctif et des muscles lisses. D’autres endroits semblables, mais plus petits, sont intercalés entre ces endroits principaux autour de l’orifice anal interne.1 Pendant le passage de selles et lorsque l’on tousse, éternue ou exerce un effort, ces endroits s’engorgent de sang. En ce qui concerne le passage de selles, l’enflure protège le tissu anal sous-jacent et lorsque l’on tousse, éternue ou exerce un effort, les coussinets engorgés aident à prévenir des fuites de selles. Habituellement, l’enflure disparaît rapidement à la suite de ces actions. Les surfaces supérieures contiennent aussi des terminaisons nerveuses qui aident à faire la distinction entre les liquides, les solides et le gaz dans la région anale.2

Lorsque les coussinets restent enflés, allant même jusqu’à se déplacer, ils sont appelés des hémorroïdes. On donne le nom de prolapsus au tissu rectal qui sort de l’anus.3 La plupart des sources désignent ces masses agrandies de tissu rectal tout simplement sous le nom d’hémorroïdes et nous ferons de même tout au long de cet article. Il peut y avoir de nombreux facteurs favorisant les hémorroïdes, mais dans la majorité des cas, une pression accrue dans l’abdomen joue un rôle clé. On compte parmi les facteurs sous-jacents les plus communs pour le développement d’hémorroïdes, la constipation et l’effort au passage des selles, le soulèvement d’objets lourds de façon répétitive, la diarrhée fréquente, le fait de demeurer assis ou debout pendant de longues périodes de temps, l’obésité et la grossesse. Près de 5 % de la population ont des hémorroïdes à n’importe quel moment,4 et à l’âge de cinquante ans, le risque d’en avoir souffert au moins une fois s’élève à 50 %. Le risque est accru s’il y a des antécédents familiaux d’hémorroïdes, et 38 % des femmes qui en sont à leur troisième trimestre de grossesse en souffriront.5

Il existe deux types d’hémorroïdes, externes et internes, pouvant se produire séparément ou en combinaison. Il peut y avoir une seule hémorroïde ou plusieurs en même temps. La présence de sang rouge vif pendant ou après les selles constitue le symptôme principal des hémorroïdes internes, mais ces dernières ne sont généralement pas douloureuses sauf si elles développent un caillot sanguin (thrombose). Les hémorroïdes externes sont plus susceptibles de provoquer de la douleur et des démangeaisons puisqu’elles sont plus riches en nerfs; elles prennent habituellement l’apparence d’un renflement violet à l’extérieur de l’anus. De nombreuses personnes ne consulteront pas un médecin à moins que les symptômes soient graves à cause de la gêne et du stigmate associés aux problèmes de l’anus. Il est très important de recevoir un bon diagnostic d’un professionnel de la santé puisque les saignements rectaux et la douleur peuvent aussi être des symptômes d’autres affections gastro-intestinales plus sérieuses.

Les hémorroïdes disparaissent habituellement par elles-mêmes en l’espace de quelques jours et il peut être possible de gérer les symptômes par un traitement à domicile. Un régime alimentaire équilibré, riche en fibres et qui contient des quantités suffisantes de liquides; des bains de siège où l’on s’assoit dans un bain chaud et peu profond qui contient du sel; et des traitements topiques en vente libre peuvent aider à soulager les symptômes. Cependant, les hémorroïdes peuvent parfois persister, devenir de grande taille ou occasionner de la douleur intense, ce qui nécessite un traitement médical. Selon la situation particulière, le médecin choisira un traitement parmi les suivants : la chirurgie traditionnelle, la ligature élastique, la thérapie de coagulation, la sclérothérapie, la cryochirurgie ou l’agrafage. Cet article passera en revue ces interventions et se penchera sur les méthodes par lesquelles les médecins les pratiquent, comment elles fonctionnent et quels effets secondaires et complications possibles y sont rattachés.

Risque associé au AINS: Il est normal de connaître de la douleur et de l’inconfort après une intervention médicale pour les hémorroïdes. Un bain de siège ou un médicament contre les douleurs légères, comme l’acétaminophène, peuvent apporter un certain soulagement. Il ne faut cependant pas utiliser de l’aspirine, de l’ibuprofène ou tout autre anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) pendant quatre à cinq jours avant ou après le traitement puisque ces médicaments augmentent le risque de saignement.

 

Chirurgie traditionnelle

Cette intervention repose sur l’excision chirurgicale de l’hémorroïde à l’aide d’un bistouri, d’un laser ou d’un bistouri électrique. Le médecin choisira habituellement cette méthodologie de traitement plus ancienne seulement après que d’autres traitements moins invasifs se soient avérés inefficaces. Il est rare qu’une hémorroïde retirée par chirurgie traditionnelle revienne, mais un séjour hospitalier de quelques jours pourrait être requis à la suite de la chirurgie, principalement en raison de la douleur. En outre, la période prévue pour la guérison, soit de 5 à 6 semaines, est considérablement plus longue comparée à d’autres traitements.6

Ligature élastique

La ligature élastique, méthode très efficace, est l’intervention la plus courante dans le traitement des hémorroïdes internes. Après avoir inséré un appareil appelé ligateur dans l’anus, le médecin emprisonne doucement l’hémorroïde dans l’appareil, la tord légèrement pour ensuite la retenir en place au-dessus de la ligne dentée sensible avant de rapidement placer un anneau élastique autour de sa base pour compléter le processus. Cette intervention, comme d’autres dont nous discuterons, fonctionne en coupant la circulation du sang dans l’hémorroïde, de sorte que le tissu meurt et se détache en l’espace d’environ une semaine. Il est normal de connaître un léger saignement lorsque ceci se produit. Du tissu fibreux se forme pendant la guérison, fixant le reste du coussinet hémorroïdaire en place pour aider à prévenir d’autres hémorroïdes à cet endroit dans le futur.4,7
S’il y a de la douleur ou de l’inconfort après l’intervention, le médecin peut apporter un léger ajustement à l’anneau à l’aide d’un doigt ganté ou injecter l’endroit de médicaments contre la douleur.8 Mis à part la chirurgie traditionnelle qui s’accompagne de risques et d’effets secondaires supplémentaires, la ligature élastique est la méthode la plus efficace pour retirer des hémorroïdes internes de taille moyenne. Elle n’est cependant pas appropriée pour des hémorroïdes de très petite ou très grande taille.

Un des effets secondaires est la sensation d’avoir besoin d’aller à la selle. Il est aussi normal de ressentir un peu de douleur, surtout de 24  48 heures après l’intervention. Les effets secondaires rares comprennent une douleur sévère qui ne répond pas à un traitement, un saignement, l’incapacité d’uriner et l’infection9 Un médecin ne pratique normalement qu’une ou deux ligatures par séance parce que les ligatures simultanées augmentent le risque de complications.3

Thérapie de coagulation

Le type de thérapie de coagulation la plus courante est la photocoagulation infrarouge lors de laquelle le médecin utilise la chaleur émise par un intense faisceau de lumière infrarouge pour créer du tissu fibreux sur l’hémorroïde, coupant la circulation du sang dans le tissu rectal agrandi. Le médecin pourrait aussi pratiquer une thérapie de coagulation au moyen d’un laser ou d’un courant électrique. Ce traitement est conçu pour les hémorroïdes de petite taille et de taille moyenne. Il existe un risque de douleur pendant l’intervention et des hémorroïdes symptomatiques peuvent réapparaître. Les effets secondaires et les complications sont à peu près les mêmes que pour la ligature élastique.10

Sclérothérapie

Le médecin pourrait choisir la sclérothérapie pour traiter des hémorroïdes internes qui sont trop petites pour la ligature élastique. Il injecte un produit chimique (le sclérosant) dans la base de l’hémorroïde, ce qui la durcit et empêche le sang d’alimenter le tissu muqueux enflé, lequel meurt et vient à se détacher. Le tissu fibreux qui en résulte aide à prévenir d’autres hémorroïdes de se former au même endroit. Cependant, les hémorroïdes réapparaissent parfois à la suite d’une sclérothérapie, nécessitant un autre traitement. Il est normal de ressentir de la douleur après cette intervention. Des complications rares pourraient inclure une réaction allergique au sclérosant, une douleur grave ou persistante, une infection ou un saignement. Cette intervention demande un haut niveau de compétence puisque l’injection du produit chimique au mauvais endroit, tel que dans la veine anale ou dans la prostate, peut occasionner d’autres complications plus sérieuses.11

Cryochirurgie

Lors de cette procédure, le médecin utilisera d’abord une anesthésie locale pour geler l’endroit avant d’appliquer de l’oxyde nitreux ou de l’azote liquide avec une sonde cryogénique pour geler les hémorroïdes internes ou externes. Le médecin peut aussi les attacher (ligaturer) avant de les geler. Les hémorroïdes rapetissent et se détachent dans l’espace de 2 à 3 semaines. La douleur tend à être plus prononcée après ce type de traitement et il y a des risques accrus, tels que l’infection et le saignement. La cryochirurgie était auparavant très courante, mais la plupart des médecins choisissent maintenant un traitement différent en raison des nombreuses complications potentielles de cette intervention.12

Agrafage

L’agrafage est une technique utilisée pour les hémorroïdes prolabées de grande taille.13 Une hémorroïde prolabée est une hémorroïde de type interne qui s’est déplacée vers le bas et est devenue étirée au point de sortir par l’anus. Sous anesthésie locale, le médecin se sert de nombreux outils spéciaux pour pousser le tissu plus près de son endroit d’origine le long de la paroi anale ou rectale, enlève l’excès de tissu et fixe ensuite le coussinet en son endroit original à l’aide d’agrafes circulaires en titane. Du tissu fibreux se forme autour des agrafes lors du processus de guérison, ce qui aide à ancrer le coussin hémorroïdaire en place. Les agrafes viennent à sortir de façon inaperçue avec les selles.

Le risque de récurrence des hémorroïdes est plus élevé avec l’agrafage qu’avec la chirurgie traditionnelle, mais le temps de guérison est plus rapide et moins douloureux.14 Comme avec d’autres interventions, il peut y avoir une sensation de plénitude ou de pression rectale pendant plusieurs jours à la suite de l’intervention. Il peut aussi y avoir des saignements. Les complications potentielles comprennent une incapacité d’uriner, une déchirure de la muqueuse de la paroi anale (fissure), un trauma à la paroi rectale, une quantité excessive de tissu cicatriciel qui rétrécit la paroi anale ou rectale et l’infection.15

Conclusion

Il est important à la suite d’une intervention pour hémorroïdes réussie d’adopter un régime alimentaire équilibré riche en fibres et de consommer des quantités adéquates de liquides. Si vous souffrez d’hémorroïdes qui persistent pour une période de temps prolongée ou qui sont très douloureuses, consultez votre médecin afin de discuter des options de traitement qui vous conviennent le mieux.

4 étapes simples pour aider à prévenir les hémorroïdes16

Si vous êtes enceinte ou génétiquement prédisposé à développer des hémorroïdes symptomatiques, ces dernières peuvent être impossibles à prévenir, mais les conseils énumérés ci-dessous pourraient quand même réduire votre risque d’en souffrir :

  • Consommez des collations et repas bien équilibrés et riches en fibres et suffisamment de liquides.
  • Évitez de demeurer assis ou debout pendant de longues périodes de temps. Faites de petites marches aussi souvent que possible.
  • Ne retardez pas le passage de selles lorsque le besoin se fait sentir.

Respirez librement, évitez des efforts prolongés lors du passage des selles et évitez d’autres activités où une force excessive est requise telles que le soulèvement d’objets lourds.


Dr Iain G.M. Cleator, professeur émérite de chirurgie
Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMC numéro 183 – 2012
1. Lohsiriwat V. Hemorrhoids: From basic pathophysiology to clinical management. World Journal of Gastroenterology. 2012;18(17):2009-17.
2. Sneider EB et al. Diagnosis and Management of Symptomatic Hemorrhoids. Surgical Clinics of North America. 2010;90:17-32.
3. Madoff RD et al. American Gastroenterological Association Technical Review on the Diagnosis and Treatment of Hemorrhoids. Gastroenterology. 2004;126:1463-73.
4. Johanson JF. Nonsurgical treatment of hemorrhoids. Journal of Gastrointestinal Surgery. 2002;6(3):290-294.
5. Vohra S et al. The effectiveness of Proctofoam-HC for treatment of hemorrhoids in late pregnancy. J Obstet Gynaecol Can. 2009;31(7):654-659.
6. Hemorrhoids.net. Traditional Surgery. http://www.hemorrhoid.net/surgery.php#tradtional. Accessed 2011-01-09.
7. Schubert MC. What every gastroenterologist needs to know about common anorectal disorders. World Journal of Gastroenterology. 2009;15(26):3201-09.
8. The Cleater Clinic. Methods of Treatment. http://www.haemorrhoids.ca/haemorrhoids.php#methods_treatment. Accessed 2011-01-09.
9. HealthLinkBC. Rubber Band Ligation for Hemorrhoids. http://www.healthlinkbc.ca/kb/content/otherdetail/hw212526.html. Accessed 2011-01-09.
10. HealthLinkBC. Infrared Photocoagulation for Hemorrhoids. http://www.healthlinkbc.ca/kb/content/otherdetail/hw212815.html. Accessed 2011-01-09.
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14. Giordano P et al. Long-termm Outcomes of Stapled Hemorrhoidopexy vs Conventional Hemorrhoidectomy. Archives of Surgery. 2009;144(3):266-72.
15. Hemorrhoid.net. Procedure for Prolapse and Hemorrhoids. http://www.hemorrhoid.net/procedure_prolapse.php. Accessed 2011-01-09.
16. HealthLinkBC. Hemorrhoids: Prevention. http://www.healthlinkbc.ca/kb/content/major/hw213495.html#hw213687. Accessed 2012-08-15.
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