Progrès en matière de diverticulose colique et alimentation

De nouvelles preuves mettent en lumière la façon dont l’alimentation influence la diverticulose colique et renforcent certaines des positions de longue date de la Société gastro-intestinale, comme le fait que les noix et les graines peuvent être consommées sans problème. Le présent article met l’accent sur les dernières recherches, qui suggèrent de nouvelles recommandations sur ce que vous pouvez faire pour aider à réduire les risques associés à la diverticulose colique au moyen de changements à l’alimentation et au mode de vie.

La diverticulose colique et la diverticulose sont des termes interchangeables qui désignent la présence de petites évaginations (diverticules) dans le gros intestin (côlon). Elle touche environ 5 % de la population adulte occidentale âgée de moins de 40 ans, mais monte en flèche pour atteindre au moins 50 % des personnes de plus de 60 ans. Cette maladie est plus répandue chez les personnes âgées, affichant une prévalence de presque 65 % chez les plus de 85 ans, la majorité ne présentant aucun symptôme ou complication.1 Une diverticulite se produit lorsque les évaginations deviennent enflammées ou infectées, occasionnant des symptômes tels que des nausées, des vomissements, des douleurs abdominales et des saignements. Pourquoi cela se produit-il? Les scientifiques suggèrent que cela est probablement attribuable à plusieurs facteurs, notamment la génétique, l’environnement et, selon des preuves récentes, l’inflammation et l’état du microbiome intestinal.2,3

La théorie traditionnellement acceptée selon laquelle un régime à faible teneur en fibres provoque la diverticulose, provient d’un article publié en 1971 par Painter et Burkitt dans le British Medical Journal.4 Ils ont émis l’hypothèse que la raison pour laquelle la diverticulose était si courante en Occident découlait du fait que le régime alimentaire occidental typique était beaucoup plus faible en fibres que dans les pays d’Afrique, où la diverticulose était rare. Cependant, les chercheurs n’ont pas réellement évalué le régime alimentaire ni la diverticulose; il ne s’agissait simplement que d’une hypothèse. Par la suite, les recherches dans ce domaine ont stagné pendant un certain temps, mais elles ont repris au cours des deux dernières décennies.2

Fibres

Lorsqu’un patient souffrant d’une diverticulite aiguë se présente à l’hôpital, son régime alimentaire est modifié pour ne comprendre que des liquides (jus, bouillon, Jello, etc.) afin de permettre à son côlon de se reposer. Il peut graduellement passer à un régime à faible teneur en fibres au fur et à mesure que ses symptômes s’apaisent et qu’il commence à se sentir mieux. Avant que le patient quitte l’hôpital, un diététiste professionnel lui conseillera d’augmenter progressivement sa consommation de fibres à la maison jusqu’à adopter un régime riche en fibres, et ce, dans l’espoir de réduire le risque d’une diverticulite récurrente.

Les lignes directrices actuelles recommandent toujours un régime riche en fibres pour prévenir la diverticulose colique, bien qu’elles s’appuient sur des preuves de faible qualité provenant d’études d’observation.5,6,7 Une analyse de plusieurs études (méta-analyse,) publiée l’année dernière dans le European Journal of Nutrition8 a conclu qu’un régime alimentaire à haute teneur en fibres pourrait réduire le risque de diverticulose colique. Les chercheurs ont constaté que les personnes qui consommaient 40 g de fibres par jour présentaient une réduction de 58 % du risque de diverticulose colique par rapport à celles qui ne consommaient que 7,5 g de fibres par jour. Ils ont également noté que les personnes qui suivent un régime alimentaire riche en fibres ont tendance à avoir un mode de vie plus sain en général.

Une autre étude, publiée en 2019,9 a examiné l’association entre la consommation de fibres et le risque de diverticulite chez 50 019 femmes, âgées de 43 à 70 ans, participant à l’étude Nurse’s Health Study qui a été menée de 1990 à 2014. Ils ont constaté qu’un apport plus élevé en fibres était associé à une réduction du risque de diverticulite chez les femmes, en particulier lorsqu’elles consommaient davantage de grains entiers et de fruits entiers, notamment des pommes, des poires et des pruneaux.

Les fibres pourraient contribuer à réduire le risque de diverticulose colique grâce à leurs effets anti-inflammatoires et à la manière dont elles modifient le microbiome intestinal, plutôt qu’à leur aptitude à réduire la constipation et à favoriser la régularité intestinale.5,7,9,10 Il est évident que d’autres recherches de haute qualité sont requises pour confirmer ces résultats — il sera intéressant de voir les découvertes qui en découleront.

Tableau 1 — Exemple d’un régime à haute teneur en fibres (40 g)

  Aliment Fibres
Déjeuner ¾ tasse d’avoine cuite (avoine à cuisson rapide

½ tasse de framboises (congelées)

1 c. à table de graines de lien entières

 

3,5 g

4,8 g

2,9 g

Dîner deux tranches de pain de seigle rôties

deux tranches de fromage cheddar fort une pomme moyenne avec la peau

2,2 g

0 g

3,5 g

Souper ½ tasse de pois chiches grillés

1 tasse de quinoa cuit

½ tasse de tomates en conserve

1 tasse d’épinards crus

9,6 g

5,5 g

1,0 g

0,7 g

Collation une poire moyenne avec la peau

¼ tasse de noix de Grenoble

5,3 g

1,7 g

Total 40,7 g


*Source = Fichier canadien sur les éléments nutritifs

Noix, graines et maïs soufflé

Ma grand-mère souffrait de diverticulose et elle a fini par éviter les noix et les graines pendant bien des années, y compris les fraises et les bleuets frais qu’elle aimait tant. Une vaste étude novatrice publiée en 200810 a entrepris de vérifier la théorie selon laquelle les noix, les graines et le maïs soufflé provoquent la diverticulite. Les chercheurs ont suivi 47 228 hommes dans le cadre de l’étude Health Professional’s Follow-up Study, de 1986 à 2004, et ont constaté que ces aliments n’étaient pas associés à un risque de diverticulite ou de saignement diverticulaire.

De plus, ils n’ont pas constaté de lien particulier entre la consommation de bleuets et de fraises, et les complications diverticulaires. En revanche, ils ont constaté que les hommes qui mangeaient davantage de ces aliments présentaient moins de cas de diverticulite que ceux qui n’en mangeaient pas. Ils ont conclu que les noix et les graines pouvaient en fait protéger contre la diverticulite, peut-être en raison de leurs effets anti-inflammatoires.2,6,10,11 Les lignes directrices du NICE, au Royaume-Uni, et les directives PEN des Diététistes du Canada indiquent, au sujet de la diverticulite, qu’il n’est pas nécessaire d’éviter les noix, les graines, le maïs soufflé ou les peaux de fruits.12 Ma grand-mère aurait pu savourer ces baies qu’elle aimait tant, après tout!

Viande rouge, volaille et poisson

Certaines études ont démontré que la consommation de viande rouge accroît le risque de diverticulose colique, tandis que d’autres n’ont trouvé aucun lien.2,5 Une étude de cohorte prospective d’envergure, publiée en 2018, s’est penchée sur l’alimentation de 51 529 hommes participant à l’étude Health Professional’s Follow-up Study, de 1986 à 2012. Les chercheurs ont observé une association entre la consommation de viande rouge et un risque accru de diverticulite aiguë, sans toutefois noter un tel lien avec une consommation plus importante de volaille ou de poisson.13 Dans l’ensemble, la question de savoir si la viande rouge augmente le risque reste controversée. Toutefois, étant donné les nombreux autres avantages découlant d’un apport réduit de viande rouge, je suggérerais d’en réduire sa consommation.

Caféine, alcool et tabagisme

La consommation de caféine ou d’alcool n’influence pas le risque de diverticulose colique.2,6,7 Le tabagisme pourrait augmenter le risque de diverticulite, et les directives actuelles recommandent de cesser de fumer, même si aucune association significative n’a été trouvée.6,7,12

Vitamine D

Un faible taux sérique de vitamine D (25-OH D) est un facteur de risque de la diverticulose colique qui pourrait jouer un rôle dans le développement de l’affection.2 De façon semblable, un faible taux de vitamine D joue un rôle dans d’autres affections inflammatoires, telles que la maladie de Crohn.3 Les lignes directrices PEN des Diététiciens du Canada recommandent actuellement aux personnes atteintes de diverticulose colique d’obtenir une quantité adéquate de vitamine D.6

Probiotiques

Les preuves venant appuyer l’utilisation de probiotiques en cas de diverticulite aiguë sont insuffisantes. En fait, les lignes directrices de 2015 de l’American Gastroenterology Association déconseillent l’utilisation de probiotiques pour une diverticulite non complexe.3,6 Une revue systématique de onze études sur l’utilisation de divers probiotiques dans le traitement de la diverticulose colique a révélé une tendance positive dans la réduction des symptômes abdominaux; toutefois, compte tenu des diverses souches et doses de probiotiques utilisées, les auteurs de l’étude n’ont pas été en mesure de formuler des recommandations.3

Activité physique

L’activité physique est associée à un risque réduit de diverticulite et de saignement diverticulaire.2,5,7 Les lignes directrices du NICE, au Royaume-Uni, recommandent un régime d’exercice pour réduire le risque de diverticulose colique symptomatique.12 L’American Gastroenterology Association recommande l’activité physique vigoureuse, comme la course, aux personnes ayant connu des épisodes de diverticulite.3 Il est important de noter que ces associations et ces lignes directrices sont basées sur des preuves de faible qualité,7 mais étant donné les nombreux avantages que procure l’activité physique, si vous n’êtes pas déjà actif et que vous pouvez l’être, pourquoi ne pas l’essayer?

Obésité

L’obésité, en particulier celle de nature abdominale, présente un risque accru de diverticulose colique, y compris des complications connexes comme une hémorragie diverticulaire et une diverticulite.2,3,5,7,8 L’obésité est estimée être un état inflammatoire; ainsi, la consommation d’aliments riches en fibres, dont certains ont des effets anti-inflammatoires, pourrait contribuer à réduire une inflammation chronique induite par l’obésité.9

Conclusion

Il est temps de dire adieu aux théories populaires, mais non prouvées, sur l’alimentation en lien avec la diverticulose colique. Si vous êtes aux prises avec la diverticulose, il n’est pas nécessaire d’éviter les noix, les graines et les baies, aliments denses en nutriments et aux propriétés anti-inflammatoires, qui pourraient en fait aider à prévenir l’apparition de la diverticulose. J’attends avec impatience de nouvelles recherches qui permettront d’approfondir le rôle que joue l’alimentation dans l’inflammation et la modification du microbiome intestinal, et ce que cela signifiera pour la prévention et le traitement de la diverticulose colique à l’avenir. En attendant, il existe de nombreuses stratégies visant un mode de vie sain qui peuvent aider à réduire le risque de diverticulose colique, et qui valent donc la peine d’être essayées.

Dix stratégies liées au mode de vie qui pourraient aider à réduire le risque de diverticulite

  1. Mangez un régime alimentaire riche en fibres (de 35 à 40 g/jour).
  2. Consommez davantage de fibres insolubles (p. ex., graines de lin entières, noix, baies, légumes crus, peaux de fruits et légumes).
  3. Consommez régulièrement des fruits entiers, surtout pommes, poires et pruneaux.
  4. Ajoutez des noix et des graines aux aliments que vous aimez (p. ex., noix de Grenoble sur du gruau, graines de sésame sur des asperges, graines de citrouille grillées sur une salade aux épinards).
  5. Consommez du poulet et du poisson plus souvent que de la viande rouge.
  6. Souffrez-vous de constipation? Songez à prendre un supplément de fibres (p. ex., psyllium) et buvez plus d’eau.
  7. Maintenez des taux adéquats de vitamine D et songez à prendre un supplément si votre taux sanguin n’en contient pas suffisamment.
  8. Soyez physiquement actif (p., ex., jogging, course).
  9. Perdez du poids si vous souffrez d’embonpoint ou êtes obèse.
  10. Cessez de fumer.

Anne-Marie Stelluti, R.D.
Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 214 – 2020
1. Weizman AV et al. Diverticular disease: Epidemiology and management. Can J Gastroenterol. 2011; 25(7): 385 389.
2. Strate LL, et al. Epidemiology, Pathophysiology, and Treatment of Diverticulitis. Gastroenterology. 2019; 156(5): 1282-1298.
3. Rezapour M et al. Diverticular Disease: An Update on Pathogenesis and Management. Gut and Liver. 2018; 12(2): 125-132.
4. Painter NS, Burkitt DP. Diverticular Disease of the Colon: A Deficiency Disease of Western Civilization. British Medical Journal. 1971; 2: 450-454.
5. Tursi A, Elisei W. Diet in colonic diverticulosis: is it useful? Pol Arch Intern Med. 2020; 130:232-239.
6. PEN The Global Resource for Nutrition Practice. Gastrointestinal System – Diverticular Disease page. Disponible à https://www.pennutrition.com. Consulté le 2020-04-20.
7. UpToDate. Diverticular Disease page. Disponible à https://www.uptodate.com. Consulté le 2020-04-20.
8. Aune D et al. Dietary fibre intake and the risk of diverticular disease: a systematic review and meta-analysis of prospective studies. Eur J Nutr. 2020; 59(2): 421-432. 
9. Ma W et al. Intake of Dietary Fiber, Fruits, and Vegetables and Risk of Diverticulitis. Am J Gastroenterol. 2019; 114: 1531-1538.
10. Strate LL, et al. Nut, corn and popcorn consumption and the incidence of diverticular disease. JAMA. 2008; 300(8): 907-914.
11. Peery AF, Sandler RS. Diverticular disease: Reconsidering Conventional Wisdom. Clin Gastroenterol Hepatol. 2013; 11(12): 1532-7.
12. NICE. Diverticular Disease: diagnosis and management page. Disponible à https://www.nice.org.uk/guidance/ng147. Consulté le 2020-04-24.
13. Cao Y et al. Meat intake and risk of diverticulosis among men. Gut. 2018; 67(3): 466-472.
Photo : © Nadezhda Nesterova | bigstockphoto.com