Colite microscopique

La colite microscopique (CM) est une forme de maladie inflammatoire de l’intestin (MII) caractérisée par une diarrhée aqueuse soudaine et chronique exempte de sang. En moyenne, les épisodes de diarrhée se produisent de six à neuf fois par jour, pouvant cependant se manifester plus de dix fois. Chez de nombreuses personnes, environ un tiers de ces épisodes surviennent la nuit, perturbant gravement le sommeil et contribuant à la fatigue.

D’autres symptômes comprennent l’incontinence fécale, la gêne ou la douleur abdominale, la perte de poids, les nausées et les vomissements. Chez certaines personnes, la CM se manifeste principalement par une constipation chronique ou par une constipation consécutive à des épisodes de diarrhée.

Il existe deux sous-types de colite microscopique.

  • La colite collagène est caractérisée par une couche épaissie de collagène sous-épithélial.
  • La colite lymphocytaire est caractérisée par une augmentation du nombre de cellules du système immunitaire dans la couche épithéliale du tube digestif.

L’incidence de CM est d’environ 11 personnes sur 100 000 chaque année. Toutefois, ce chiffre est probablement grandement sous-estimé, puisque cette maladie est peu connue du public et des professionnels de la santé, entraînant souvent un diagnostic erroné d’un autre trouble digestif.1

La CM touche davantage les femmes que les hommes et se présente généralement chez les personnes de plus de 62 ans. Cependant, elle peut se manifester à tout âge, certains cas étant observés chez des personnes de moins de 45 ans et, dans de rares cas, chez des enfants.

Facteurs de risque

Des études ont cerné des associations entre les facteurs de risque suivants et le développement de la colite microscopique :1

  • tabagisme (antérieur et actuel);
  • infection antérieure à Clostridioides difficile (infection à difficile);
  • utilisation antérieure ou actuelle de certains médicaments (c.-à-d., inhibiteurs de la pompe à protons, anti-inflammatoires non stéroïdiens, inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine, inhibiteurs de point de contrôle immunitaire);
  • présence du gène haplotype HLA-DQ2.

La colite microscopique est également associée au diagnostic d’autres maladies auto-immunes (c.-à-d., maladie cœliaque, thyroïdite de Hashimoto, polyarthrite rhumatoïde, syndrome de Sjögren, psoriasis, diabète de type 1) ainsi que de troubles de malabsorption des acides biliaires.

Diagnostic

Le diagnostic commence par un examen approfondi des antécédents médicaux et des symptômes (moment où et façon dont ils sont apparus), en particulier la nature de la diarrhée et sa durée. Si la diarrhée persiste pendant plus de quatre semaines, les lignes directrices cliniques recommandent une iléocoloscopie avec le prélèvement de biopsies sur les côtés gauche et droit du côlon à des fins d’examen.2

Il est essentiel que le médecin effectue la biopsie de plusieurs régions afin d’obtenir un diagnostic précis, étant donné que des erreurs peuvent se produire en raison de changements dans la présentation clinique de la CM au fil du temps. Malheureusement, les chercheurs n’ont pas encore identifié de biomarqueurs fiables pour le diagnostic et le suivi de la maladie.

Gestion

Il existe plusieurs façons de gérer et de traiter la colite microscopique. Il s’agit notamment de modifications au mode de vie, comme l’arrêt du tabagisme et la réduction de la consommation d’alcool. Bien que les recherches sur le rôle de l’alimentation soient limitées, certaines suggèrent qu’un apport élevé en calcium alimentaire pourrait avoir des effets protecteurs contre le développement de la CM.1

L’objectif du traitement de la colite microscopique est l’obtention d’une rémission. Celle-ci se constitue par la présence de moins de trois selles par jour et, idéalement, sans qu’aucune soit sous forme liquide. Le médecin conseillera également l’arrêt de médicaments susceptibles de provoquer de la diarrhée, le cas échéant.

Le budésonide est le traitement de référence pour induire et maintenir une rémission de tout sous-type de CM.2 Il est disponible sous forme de comprimés oraux (Cortiment®, Entocort®), de lavements (Entocort® en lavement) et de mousses rectales (Uceris™). Bien que l’usage de ces médicaments soit hors indication (Santé Canada n’a pas approuvé la CM comme indication pour eux), plusieurs études ont démontré que le budésonide est sûr pour une utilisation à long terme et présente des effets secondaires limités. Vous pouvez vous renseigner sur ces médicaments en utilisant notre guide interactif des médicaments contre la MII.

Pour les personnes souffrant de diarrhée en lien avec les acides biliaires, le prestataire de soins peut prescrire un séquestrant des acides biliaires, tel que la cholestyramine, le chlorhydrate de colésévélam et le chlorhydrate de colestipol.

Si le budésonide est inefficace, le médecin peut recommander une thiopurine ou un certain médicament biologique, comme l’infliximab (original : Remicade®; biosimilaires : Avsola®, Inflectra®, Ixifi®, Omvyence™, Remsima™SC, Renflexis®), l’adalimumab (original : Humira®; biosimilaires : Abrilada®, Amgevita®, Hadlima®, Hadlima® PushTouch®, Hulio®, Hyrimoz®, Idacio®, Simlandi™, Yuflyma™) ou le vedolizumab (Entyvio®). Les prestataires de soins de santé peuvent également envisager la prescription d’une combinaison de ces médicaments.

La chirurgie est rare et constitue un dernier recours lorsque les médicaments ne permettent pas d’obtenir une rémission. Il peut s’agir notamment de la réalisation d’une iléostomie permanente, qui consiste à réorienter l’intestin grêle vers la surface de la peau (stomie) afin de contourner le côlon. En raison de sa rareté, il existe peu de données sur les meilleures pratiques pour la mise en œuvre de la chirurgie dans le parcours de soins.

CM et autres affections digestives

La colite microscopique présente les mêmes symptômes que plusieurs autres affections gastro-intestinales, telles que le syndrome de l’intestin irritable (SII), la maladie cœliaque et d’autres maladies inflammatoires de l’intestin (MII). Il peut être difficile de distinguer la CM de ces autres affections en raison de la sensibilisation limitée des professionnels de la santé et du public, ainsi que des difficultés d’accès aux techniques de dépistage et de biopsie. Il en résulte souvent des diagnostics erronés et des retards dans l’obtention de soins appropriés.

Syndrome de l’intestin irritable

Certains des symptômes de la colite microscopique ressemblent à ceux du syndrome de l’intestin irritable (SII), un trouble fonctionnel chronique qui se manifeste par des douleurs abdominales, des ballonnements et un dérèglement du comportement intestinal, comme la constipation ou la diarrhée, ou l’alternance des deux. Les recherches montrent qu’environ 39 % des personnes atteintes de CM ont signalé des symptômes caractéristiques du SII.3 Toutefois, il convient de noter que le SII ne perturbe généralement pas le sommeil, alors que la diarrhée causée par la CM se produit souvent la nuit.

Maladie cœliaque

La colite microscopique et la maladie cœliaque partagent le gène haplotype HLA-DQ2 comme facteur de risque. Le United European Gastroenterology ainsi que l’European Microscopic Colitis Group recommandent aux personnes atteintes de la maladie cœliaque qui souffrent de diarrhée chronique de subir une biopsie du côlon à des fins de dépistage de la colite microscopique.2

Maladie inflammatoire de l’intestin

Contrairement à d’autres types de maladie inflammatoire de l’intestin, notamment la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse, la colite microscopique ne présente aucune manifestation extra-intestinale. La CM n’augmente pas non plus le risque de cancer colorectal ou de mortalité. Cependant, ses symptômes peuvent être débilitants et avoir un impact important sur la qualité de vie.

Avenir

Il est urgent de poursuivre d’autres recherches en vue d’améliorer notre compréhension de la colite microscopique afin d’ouvrir la voie à de meilleures approches de dépistage et à des thérapies efficaces. Une sensibilisation accrue des professionnels de la santé et du public est essentielle afin que ceux-ci puissent reconnaître les signes et les symptômes de la colite microscopique, en vue de permettre un diagnostic et des soins en temps opportun.


Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 232 – 2024
1. Rutkowski K et al. Microscopic Colitis: An Underestimated Disease of Growing Importance. J Clin Med. 2024;13:5683.
2. Miehlke S et al. European guidelines on microscopic colitis: United European Gastroenterology and European Microscopic Colitis Group statements and recommendations. United European Gastroenterol J. 2021;9:13-37.
3. Guagnozzi D et al. Systematic review with meta-analysis: diagnostic overlap of microscopic colitis and functional bowel disorders. Aliment Pharmacol Ther. 2016;43:851-862.
Photo : © LightFieldStudios | elements.envato.com