Les probiotiques pourraient soulager les symptômes du SII
Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est la maladie gastro-intestinale la plus courante au monde, et pourtant c’est l’une des maladies pour lesquelles les patients obtiennent difficilement un soulagement des symptômes. Les symptômes chroniques et souvent débilitants du SII comprennent des douleurs abdominales, des ballonnements, la constipation et la diarrhée. Traiter le SII peut être un processus intimidant pour les médecins – et frustrant pour les patients – parce qu’un traitement qui fonctionne bien pour une personne ne fonctionne pas nécessairement pour une autre.
Par exemple, alors qu’une personne souffrant du SII peut connaître des attaques fréquentes de diarrhée, une autre personne atteinte du SII peut avoir le problème complètement opposé, c’est-à-dire être constipée pendant des jours. Parmi les autres symptômes associés au SII, mentionnons des spasmes intestinaux, des gaz excessifs ou du mucus dans les selles. Des facteurs tels que le stress, la diète ou une hormonothérapie substitutive peuvent aggraver les symptômes.
Une personne qui a reçu un diagnostic de SII doit recevoir un traitement adapté à ses symptômes personnels. Étant donné que de nombreux symptômes se présentent souvent en même temps, plus d’une thérapie peut être indiquée pour combattre chaque symptôme. Il peut s’agir d’une expérience exaspérante et stressante.
Également connu sous le nom de colite spasmodique, de colite spastique, de colite muqueuse, de névrose colique et de diarrhée nerveuse, le SII est la maladie digestive la plus courante en Amérique du Nord, le nombre de personnes atteintes étant d’environ 30 à 50 millions, selon les estimations. Le SII touche environ 6 millions de Canadiens, représentant jusqu’à 20 % de la population. Bien que ce ne soit pas typique, la prévalence du SII chez certaines populations pourrait même être aussi élevée que 30 %. Chose étonnante, la plupart des gens ne cherchent pas à obtenir de l’aide médicale pour leurs symptômes, et pas plus de 10 à 25 % consultent un médecin.
Le SII peut avoir un effet significatif sur la qualité de vie d’une personne et peut réduire considérablement son bien-être physique, social et émotionnel. Certaines personnes hésitent à quitter leur maison parce que leurs habitudes intestinales sont une source d’embarras pour elles ou parce qu’elles ne sont pas à l’aise si elles ne sont pas proches d’une salle de toilette.
Le SII semble être beaucoup plus fréquent chez les femmes que les hommes, mais on se demande si ce n’est pas parce que les hommes ont moins tendance à se faire soigner. Il n’y a pas de remède pour cette condition médicale, alors l’objectif du traitement consiste à maîtriser les symptômes.
Selon certaines estimations, le coût économique du SII serait de plus de 80 milliards de dollars en Amérique du Nord en raison de l’absentéisme et de la perte de productivité.
Thérapies médicales actuelles
Les symptômes associés au SII répondent parfois bien aux médicaments sur ordonnance. À titre d’exemple, Dicetel®, un médicament de relaxation des muscles gastro-intestinaux lisses, est utilisé pour soulager les douleurs abdominales et pour amener le tube digestif à travailler de façon plus constante – ce qui atténuerait la diarrhée, la constipation et le ballonnement – en exerçant un effet positif sur le péristaltisme. Le péristaltisme se caractérise par une succession de contractions musculaires involontaires qui propulsent la nourriture et les liquides tout le long du tube digestif. Modulon®, un médicament moins récent est un régulateur de la motilité du tractus gastro-intestinal inférieur qui s’attaque aussi aux douleurs intestinales. Un autre médicament qui était utilisé pour traiter le SII accompagné de constipation était le Zelnorm®; ce médicament a récemment été retiré des marchés nord-américains.
Les autres thérapies incluent les médicaments antispasmodiques qui servent à arrêter les spasmes intestinaux et à atténuer la douleur. Les médicaments antidiarrhéiques peuvent produire de bons résultats à court terme. Les laxatifs peuvent soulager temporairement la constipation, mais ne devraient pas devenir une solution à long terme, car le corps peut devenir dépendant de ces médicaments. De petites doses d’antidépresseurs peuvent aider à gérer la douleur associée au SII. Les traitements tels que l’hypnothérapie et la thérapie cognitive pourraient aussi apporter du soulagement à certains patients.
Quoi de neuf?
Même si les traitements médicaux aident certaines personnes atteintes du SII, une solution différente pourrait être nécessaire pour d’autres personnes. Une telle option naturelle qui a suscité beaucoup d’intérêt ces derniers temps est le traitement par probiotiques. Des médecins se penchent sur les bienfaits thérapeutiques possibles des espèces probiotiques Lactobacillus et Bifidobacterium depuis plus d’un siècle, et quelques études récentes portant sur des souches probiotiques spécifiques révèlent qu’elles pourraient avoir un effet bénéfique sur le syndrome de l’intestin irritable.
Dans le cadre d’un traitement par probiotiques, les personnes ingèrent des organismes vivants non pathogènes, c’est-à-dire « bons », pour aider à rétablir le bon équilibre de la flore intestinale. Les probiotiques sont les microorganismes, ou la flore, qui sont naturellement présents dans les intestins des êtres humains et contiennent de « bonnes » bactéries et levures essentielles au maintien de la fonction gastro-intestinale normale. Les probiotiques ont un attrait particulier en ce sens que les espèces bactériennes couramment utilisées, Lactobacillus, Bifidobacterium et Enterococcus, se trouvent déjà dans l’intestin, témoignant ainsi de leur coexistence chez les humains. La levure Saccharomyces boulardii lyo, qui se trouve dans la pelure du fruit litchi, est un exemple de bonne levure; elle est disponible sur le marché sous le nom de Florastor™.
Les probiotiques aident également à réduire les bactéries et levures « pathogènes » qui causent des infections opportunistes. Selon les recherches effectuées, les probiotiques aident à renforcer les défenses naturelles du corps. S’il y a déséquilibre de la flore intestinale à cause de l’utilisation d’antibiotiques ou d’autres médicaments, de l’alcool, du stress ou de la maladie, le tractus gastro-intestinal risque de ne pas fonctionner normalement. Ce fonctionnement anormal peut occasionner des difficultés gastro-intestinales.
Des experts ont réalisé de nombreuses études au fil des ans et ont convenu que les avantages associés aux probiotiques étaient spécifiques à la souche. Les résultats laissent entrevoir que certains probiotiques sont capables de prévenir les infections par des espèces pathogènes, soit en stimulant le système immunitaire soit par d’autres modes d’action comme l’exclusion compétitive ou la destruction directe des espèces pathogènes.
Jetons un coup d’œil sur la recherche
Plusieurs études randomisées à double insu, contrôlées et à petite échelle ont été réalisées pour évaluer l’efficacité de divers probiotiques chez des patients atteints du SII. Pour ces études, différents types de bactéries ont été utilisés pour des périodes de traitement de durée variable. Les résultats n’ont pas été cohérents et ont même été contradictoires à l’occasion.
Les chercheurs qui traitaient les patients atteints du SII en leur administrant Bifidobactérium infantis 35624 ont constaté une amélioration significative des douleurs abdominales, de la distension abdominale et des difficultés de passage des selles comparativement au groupe recevant un placébo. Dans cette étude auprès de 75 patients, publiée dans la revue Gastroenterology, les auteurs ont noté que l’administration d’un supplément de Lactobacillus salivarius UCC4331 à ces patients n’améliorait pas les symptômes ni les marqueurs d’inflammation en laboratoire comme le faisait le B. infantis 35624.1
Un autre mélange de probiotiques (Lactobacillus rhamnosus GG, Lactobacillus rhamnosus LC705, Bifidobactérium breve Bb99 et Propionibactérium freudenreichii ssp. shermanii JS) a été associé à l’amélioration des bruits intestinaux, mais pas des douleurs abdominales, de la distension abdominale ni de la flatulence dans une étude portant sur 103 patients atteints du SII.2
Une étude du Lactobacillus reuteri chez 54 patients sur une période de six mois a permis de constater une amélioration marquée à la fois chez le groupe recevant le traitement et le groupe recevant le placébo, ne démontrant donc aucun avantage pour les patients atteints du SII par rapport au groupe placébo.3
Des chercheurs ont testé l’efficacité du probiotique Lactobacillus GG auprès de 50 enfants atteints du SII, qui ont pris ce produit ou un placébo pendant six semaines; il en est ressorti une amélioration dans la perception du ballonnement abdominal seulement, et aucun effet sur les autres symptômes liés au SII.4
En examinant un groupe de 60 patients atteints du SII, des chercheurs suédois ont découvert que ceux qui avaient pris Lactobacillus plantarum 299v sur une période de quatre semaines éprouvaient moins de douleurs et de flatulence que ceux qui avaient pris un placébo. Au moment du suivi effectué après un an, les patients faisant partie du groupe expérimental continuaient d’avoir une meilleure fonction gastro-intestinale que les patients du groupe placébo.5
Les patients devraient être conscients du fait que bien que de nombreux produits probiotiques soient commercialisés en tant que traitements pour des maladies gastro-intestinales, dont des yogourts « spécialement formulés », des études ont démontré que bon nombre de ces produits n’ont vraisemblablement pas la capacité d’exercer un effet thérapeutique appréciable. Cela est probablement dû au fait que ces produits ne contiennent pas suffisamment de probiotiques pour faire l’affaire ou que les probiotiques ne sont plus actifs au moment où le produit est vendu.
Dans une étude menée en 2001, 40 patients atteints du SII ont reçu Lactobacillus plantarum 299v ou un placébo tous les jours pendant quatre semaines. À la fin de l’étude, tous les patients ayant pris Lp299v ont déclaré ne plus avoir de douleurs abdominales. Dans le groupe placébo, 80 % des patients éprouvaient encore des douleurs. En examinant toute la gamme des symptômes liés au SII, 95 % des patients du groupe expérimental avaient remarqué des améliorations comparativement à seulement 15 % des patients du groupe placébo.6