Les modestes merveilles de l’œsophage
Situé derrière de puissants organes – les poumons et le cœur – l’œsophage travaille sans relâche, mais sa fonction est une chose que bon nombre d’entre nous tiennent pour acquis. Cela semble pourtant assez simple – on avale, les aliments et les liquides descendent dans la gorge, et peu de temps après ils se retrouvent dans l’estomac. Point final.
En fait, les mécanismes de l’œsophage sont tellement compliqués que les scientifiques ne les comprennent toujours pas complètement. Au fur et à mesure que les chercheurs découvrent les complexités des nombreux processus nécessaires à une simple déglutition, ils deviennent mieux équipés pour étudier les conditions qui se produisent lorsqu’une partie du système œsophagien fonctionne mal.
Le péristaltisme est le mouvement normal de pompage et de contraction de l’œsophage, de l’estomac et de l’intestin grêle vers le bas. Lorsque l’on avale, les couches de muscles longitudinaux de l’œsophage se contractent pour augmenter l’épaisseur de la paroi musculaire au même endroit et au même moment que les muscles circulaires se contractent pour accroître la pression.1 Ces muscles se déplacent habituellement en synchronicité parfaite en un mouvement d’ondulation vers le bas, propulsant les aliments à travers l’œsophage et dans l’estomac dans l’espace d’environ neuf secondes.2
Deux composantes importantes de l’œsophage sont le sphincter œsophagien supérieur (SOS) et le sphincter œsophagien inférieur (SOI) dont les actions sont involontaires et sous le contrôle du tronc cérébral. La déglutition déclenche l’ouverture du SOS pour pousser les aliments dans l’œsophage. Le SOI, situé dans la partie inférieure de l’œsophage où ce dernier rencontre l’estomac, demeure normalement complètement fermé, mais il se relâche et s’ouvre brièvement lorsque les aliments l’atteignent pour les laisser passer dans l’estomac.
Les brûlures d’estomac se produisent lorsque le SOI ne fonctionne pas bien – il ne se ferme pas assez rapidement ou demeure légèrement ouvert – permettant au contenu acide de l’estomac de remonter dans l’œsophage. Dans les cas de reflux gastro-œsophagien (RGO) pathologique non traités, ce reflux se produit régulièrement.
L’achalasie est un trouble rare caractérisé par une absence du péristaltisme ou une défaillance de la relaxation coordonnée du SOI pendant la déglutition, prévenant le contenu œsophagien de passer à l’estomac. Généralement, les muscles du SOI se relâchent lorsqu’ils reçoivent des messages précis du cerveau, mais les chercheurs ont découvert qu’en fait, le SOI s’ouvre par l’entremise d’un mécanisme différent, lequel n’est pas encore très bien compris.3 Dans les cas d’achalasie, il y a une dégénérescence des cellules nerveuses qui signalent au cerveau de relâcher le SOI. Fait intéressant, chez 10 % des patients atteints d’achalasie, le SOI se relâche de façon normale, mais ne s’ouvre quand même pas.
Le mécanisme de la déglutition se compose de bien plus qu’un simple mouvement de muscles. La fonction stimulus-réponse de l’œsophage consiste aussi en un système complexe de voies sensorielles qui vont et viennent entre l’œsophage et le cerveau. Un certain nombre de neurones sensoriels (nocirécepteurs) situés à l’intérieur de la paroi œsophagienne peuvent ressentir les stimuli thermiques, chimiques et mécaniques, lesquels aident à déclencher les actions involontaires des muscles œsophagiens. Les personnes atteintes de reflux œsophagien non érosif et de dyspepsie fonctionnelle (trouble chronique qui perturbe la sensation du péristaltisme) ont tendance à être hypersensibles à ces stimuli.
Environ 25 % des fibres sensorielles reliant l’œsophage au cerveau passent près de neurones qui reçoivent aussi des renseignements sensoriels du cœur. C’est pourquoi il est parfois difficile de faire la distinction entre une douleur liée à un problème du cœur (p. ex., l’angine) et une douleur œsophagienne. Il est intéressant de noter que l’anxiété, la dépression et le stress ont aussi un effet sur les voies neurales de l’œsophage, pouvant entraîner une amplification de la douleur œsophagienne en l’absence d’un stimulant physique correspondant.
Nous avons à peine effleuré les éléments de base de la fonction de l’œsophage et des conditions qui peuvent résulter si une partie du système œsophagien ne fonctionne pas bien. Il n’est peut-être pas célèbre comme les poumons ou le cœur, ni comme les régions les plus évidentes du tube digestif telles que l’estomac et les fascinants intestins, mais l’œsophage est un formidable organe en soi. Tel un ami timide et intelligent, il coordonne ses actions avec celles du cerveau et d’autres endroits de l’organisme afin de rendre ces importantes déglutitions aussi faciles et ordinaires que possible, et ce, habituellement sans que l’on s’en aperçoive.
Risques du cancer de l’œsophage
Quoique les cancers de l’œsophage soient rares, leur incidence continue de croître à l’échelle mondiale et le taux de mortalité des personnes qui en sont atteintes est élevé. La possibilité de vivre au moins cinq ans à la suite d’un diagnostic est de seulement 14 %.4 Les chercheurs encouragent les gens à reconnaître et à éviter les facteurs de risque des cancers de l’œsophage étant donné qu’au moment où les symptômes font apparition (douleur à la poitrine, fatigue, perte de poids, difficulté progressive à avaler), la tumeur en est probablement à un stade assez avancé, rendant son traitement difficile. Si vous présentez n’importe lequel des symptômes énumérés ci-dessus ou qu’il se produit un changement important de vos symptômes de reflux gastro-œsophagien (RGO) pathologique, consultez votre médecin pour lui en parler.
Six conseils pour réduire votre risque*
- Ne fumez pas
- Mangez beaucoup de fruits et de légumes
- Évitez les boissons chaudes
- Limitez la consommation d’alcool
- Maintenez un poids sain
- Gérez votre RGO
*Source : Johns Hopkins Health Alert5
Fraises et cancer de l’œsophage
Dans le cadre d’une étude menée en Chine,6 endroit où le carcinome épidermoïde (type de cancer qui se développe généralement dans les parties supérieure et moyenne de l’œsophage) est courant, les fraises ont démontré un effet protecteur important.
L’étude de petite envergure comptait 72 patients atteints d’un certain type de plaies précancéreuses. La moitié du groupe a consommé de façon quotidienne une boisson de 30 g de fraises lyophilisées mélangées avec de l’eau et l’autre moitié a consommé le double de cette quantité de façon quotidienne. Après six mois, 5 des 36 patients du groupe ayant reçu une plus petite dose ont démontré une diminution de la gravité de la maladie, un patient a connu une aggravation de la maladie et 30 n’ont connu aucun changement. Cependant, 29 des 36 patients appartenant au groupe ayant reçu une dose plus élevée ont connu une diminution de la gravité de la maladie, 5 n’ont connu aucun changement et seulement un patient a connu une aggravation de la maladie.