Mois de sensibilisation au SII de 2020
Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est une affection tellement courante que vous connaissez probablement au moins une personne qui en souffre. En 2003, la Société canadienne de recherche intestinale (SCRI) a plaidé sa cause auprès de maires dans de grandes villes partout au Canada et a réussi à faire déclarer par Santé Canada le mois d’avril comme le Mois de sensibilisation au SII. Poursuivez votre lecture pour vous informer sur de nouvelles recherches relativement au SII et voir un infographe présentant les causes du SII. N’oubliez pas de nous suivre sur les médias sociaux et de partager nos publications pour contribuer à la sensibilisation à l’égard de cette affection.
Notions de base sur le SII
Le SII compte parmi les affections gastro-intestinales les plus courantes au monde, touchant environ de 13 à 20 % des Canadiens. Il s’agit d’un trouble fonctionnel, ce qui signifie qu’à l’heure actuelle, aucun changement physique mesurable, comme l’inflammation, n’a été cerné pour expliquer les mécanismes en cause. Les symptômes du SII peuvent influer considérablement sur la qualité de vie de ceux qui en souffrent; ils comprennent la douleur abdominale, les ballonnements et des changements dans les comportements intestinaux, tels que la constipation ou la diarrhée. Le traitement du SII peut être compliqué et consiste souvent en une combinaison de modifications au régime alimentaire et de médicaments pour cibler des symptômes précis.
Le SII et la prévalence d’anxiété et de dépression
Les recherches indiquent que le SII est étroitement lié à des troubles de santé mentale tels que l’anxiété et la dépression. Certaines études rapportent qu’autant que 50 à 60 % des personnes atteintes du SII souffrent de ces comorbidités.1 Celles-ci se retrouvent donc dans une position vulnérable, car elles courent un risque accru de connaître une détérioration de leur fonctionnement social, une mauvaise qualité de vie, une souffrance personnelle, une diminution de l’observance au traitement et même un comportement suicidaire.
Une étude récente menée par un groupe de chercheurs en Iran a évalué la prévalence d’anxiété et de dépression chez les personnes atteintes du SII et a comparé les données à celles d’un groupe témoin en bonne santé. Selon ces chercheurs, des études précédentes examinant les niveaux d’anxiété et de dépression ne faisaient que montrer la gravité du problème existant. Ils ont donc choisi d’étudier la prévalence d’anxiété et de dépression, information dont les médecins doivent être conscients afin de favoriser un dépistage précoce et d’élaborer des stratégies de traitement appropriées.
Les résultats étaient significatifs, indiquant que les personnes atteintes du SII sont beaucoup plus susceptibles d’éprouver des symptômes d’anxiété (39 %) et de dépression (29 %) que celles qui n’en souffrent pas. Fait intéressant, une autre étude, réalisée en Chine, a montré que les personnes atteintes du SII présentent souvent des symptômes plus graves et plus fréquents que celles qui n’en sont pas atteintes.2
Selon les résultats de l’étude iranienne, les symptômes d’anxiété et de dépression étaient aussi prévalents chez les hommes que chez les femmes.
En outre, le groupe des personnes atteintes du SII à constipation prédominante (SII-C) présentait le taux de prévalence le plus élevé à la fois d’anxiété et de dépression. Selon les chercheurs, cela pourrait être dû à un déséquilibre de la sécrétion de sérotonine. La sérotonine est un neurotransmetteur ayant de nombreuses fonctions dans l’organisme, mais elle est surtout connue pour ses effets sur la régulation de l’humeur et de la santé mentale. Cependant, elle joue également un rôle crucial dans la motilité gastro-intestinale, donc une faible réactivité à la sérotonine pourrait aggraver la constipation. Par conséquent, un déséquilibre de sérotonine peut entraîner à la fois des symptômes gastro-intestinaux et des problèmes de santé mentale.3
Les auteurs de l’étude ont conclu que les symptômes abdominaux influent sur l’anxiété et la dépression, tandis qu’à leur tour, les facteurs psychologiques accroissent le risque des symptômes associés au SII. Ils ont expliqué que la relation entre le SII et ces troubles de santé mentale renforce la corrélation connue de l’axe cerveau-intestin qui, en cas de dysfonctionnement, peut conduire à un intestin irritable.
En raison de son impact négatif sur la qualité de vie, le SII peut également être associé au stress et à l’affaiblissement des facultés au travail, ce qui aggrave davantage les troubles mentaux. Il est donc essentiel que les médecins qui évaluent l’anxiété et la dépression chez leurs patients le fassent aussi en fonction de leur SII. Le diagnostic et le traitement précoces d’un trouble gastro-intestinal peuvent également offrir un soulagement plus rapide des éléments de santé mentale. De même, le traitement de troubles de santé mentale peut atténuer les symptômes gastro-intestinaux.
SII — productivité du travail et affaiblissement des facultés au travail
De nombreuses études sur le SII tirent la même conclusion : les personnes atteintes du SII ont généralement une qualité de vie médiocre comparativement à la population générale et aux personnes qui souffrent d’autres affections gastro-intestinales (GI). Cela est dû non seulement aux symptômes GI comme les douleurs abdominales et des changements dans les comportements intestinaux, tels que la constipation ou la diarrhée, mais aussi aux symptômes physiques non GI, comme les maux de tête, les maux de dos, l’urgence mictionnelle et, comme indiqué ci-dessus, les comorbidités psychologiques telles que l’anxiété et la dépression.4
Ces symptômes ont un impact important sur la capacité à travailler et peuvent mener à l’affaiblissement des facultés au travail (présentéisme) ou à l’incapacité de se rendre au travail (absentéisme). De nombreuses personnes aux prises avec le SII signalent que les douleurs abdominales constituent le symptôme le plus difficile avec lequel composer, puisqu’elles peuvent rendre les mouvements et le soulèvement d’objets inconfortables — et donc le travail physique — difficiles.5
Un groupe de chercheurs suédois a mené une étude sur les taux de productivité du travail et l’affaiblissement des facultés au travail. Ils ont recueilli des données, au moyen de questionnaires, auprès de 525 personnes atteintes du SII. Ils ont examiné les taux associés à divers éléments, notamment l’absentéisme, le présentéisme, la perte totale de productivité au travail (affaiblissement global des facultés) et l’affaiblissement des facultés relativement aux activités quotidiennes de travail.
Les résultats étaient significatifs. Plus de 20 % des participants ont déclaré s’être absentés du travail la semaine précédant l’étude en raison du SII, tandis que plus de 85 % ont signalé un affaiblissement de leurs facultés (perte de productivité au travail) au cours de la même période. Les chercheurs ont constaté une association entre l’anxiété liée aux problèmes GI et l’absentéisme, ainsi qu’une forte association entre la fatigue générale et le présentéisme.6 La gravité des symptômes du SII, la fatigue et l’anxiété liée aux problèmes GI ont donné lieu à une perte de productivité globale; la gravité des symptômes du SII a également entraîné un affaiblissement des facultés. De plus, ils ont constaté que les symptômes non GI, tels que la dépression, contribuaient à l’affaiblissement des facultés et à la perte de productivité. Les chercheurs ont inclus dans leur étude le système de notation de la gravité du SII (Irritable Bowel Syndrome Severity Scoring System) ou IBS-SSS, leur permettant de constater que la productivité au travail et l’affaiblissement des facultés liées aux activités de travail chez les personnes atteintes du SII sont directement liés à la gravité de leurs symptômes.
Ils ont noté que le présentéisme comptait pour la majorité de la perte globale de productivité au travail, ce qui soutient l’hypothèse selon laquelle les patients atteints du SII se rendent au travail même s’ils souffrent de symptômes graves. Pour cette raison, les personnes touchées par le SII peuvent connaître davantage de difficultés à obtenir des résultats professionnels satisfaisants et sont moins susceptibles d’assumer davantage de responsabilités au travail, ce qui limite leurs possibilités d’avancement.
En résumé, les chercheurs ont démontré que le SII a des effets négatifs sur la vie professionnelle et que les symptômes GI et non GI contribuent à ce problème. Certaines études ont indiqué qu’un traitement adéquat des symptômes liés au SII réduisait l’affaiblissement des facultés au travail. En particulier, certains traitements non pharmacologiques, tels que la modification du régime alimentaire, et certains traitements médicamenteux, comme le linaclotide (Constella®), se sont révélés efficaces chez les personnes souffrant du SII-C.7 Il est donc essentiel que les médecins évaluent de façon approfondie les personnes atteintes du SII afin de pouvoir offrir des stratégies de traitement efficaces. Les chercheurs recommandent une approche de traitement multidimensionnelle qui traite non seulement les symptômes du SII, mais aussi la fatigue, l’anxiété liée aux problèmes GI et d’autres symptômes physiques.