L. J. Martin

Je m’agite nerveusement sur ma chaise. Je sais que cet examen est presque terminé. Je dois simplement répondre à ces deux dernières questions mathématiques et je peux filer d’ici. Je sens un mouvement dans mon intestin, puis une crampe. La chaleur qui me monte au visage est un signe qu’il ne me reste plus beaucoup de temps. « S’il vous plaît que je puisse en finir », me dis-je en resserrant tous les muscles de mon corps. Je me dépêche, devinant la réponse à la dernière question. J’espère simplement que je ne laisse échapper aucun gaz nocif en me levant pour partir. Je ne peux pas supporter l’idée que le beau garçon assis près de moi réalise que cette odeur vient de moi. Je remets l’examen à mon enseignant et je me dirige vers la salle des toilettes. Je prie pour que personne ne s’y trouve! En entrant, je vois Jaime au lavabo à se laver les mains. Je la salue rapidement et je me dirige vers la cabine près de la fenêtre. Patiemment, j’attends qu’elle quitte la salle de toilettes et j’espère que personne d’autre n’y entre! Avant que je ne puisse partir, j’entends une autre personne entrer dans la salle. « Ah non », me dis-je tout bas. Maintenant je dois attendre que cette personne reparte. J’espère qu’elle ne me reconnaîtra pas par mes souliers!

Depuis la 9e année jusqu’à l’obtention de mon diplôme, j’ai vécu un épisode gastro-intestinal de ce genre chaque jour. Bien que mon médecin savait que quelque chose n’allait pas, je n’ai reçu un diagnostic de colite ulcéreuse que peu après l’achèvement de mes études. J’ai enduré chaque examen et chaque régime d’élimination que mon médecin m’imposait, croyant qu’ils m’aideraient. Pour une adolescente, ces types d’examens sont des plus gênants. Je croyais que ma vie s’achèverait si quelqu’un à l’école découvrait mon secret. Les médecins m’ont recommandé de réduire mon stress. Cela me semblait de bons conseils, mais l’école secondaire n’est-elle pas une source intarissable de stress?

J’ai appris que mes enseignants étaient là pour m’aider et qu’ils désiraient me voir réussir. J’ai demandé à mon médecin de rédiger une lettre à l’intention de mes enseignants, leur expliquant ma situation et leur offrant des suggestions pour m’aider. L’on m’a donné la permission de quitter la salle de classe pour me rendre aux toilettes sans avoir à le demander. J’ai eu le droit de passer mes examens dans une autre pièce et l’on m’a accordé du temps additionnel pour les compléter si je devais quitter la pièce durant ceux-ci. J’ai également confié à ma meilleure amie ce que j’étais en train de vivre. Le simple fait de pouvoir en parler m’a soulagée. L’école secondaire est un milieu très stressant et la maladie inflammatoire de l’intestin (MII) n’améliore pas la situation. Avec le soutien de vos enseignants et de vos amis, vous aussi pourrez survivre.

De nombreuses années se sont écoulées depuis et il me semble avoir remplacé une situation stressante par une autre. Aujourd’hui, ce sont des choses comme mes factures, ma carrière et mes enfants qui me causent du stress. Bien que je continue de prier de pouvoir toujours trouver un désodorisant lorsque j’en ai besoin, je ne suis plus gênée par ma MII et j’en parle ouvertement.


Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMC numéro 190 – 2014