Témoignages de patients atteints de la MII
Au cours des trente-six dernières années, nous avons offert ce bulletin en qualité de tribune à nos membres/abonnés afin qu’ils puissent y raconter leur vie avec une affection gastro-intestinale (GI) telle que la maladie inflammatoire de l’intestin (MII). Au fur et à mesure que les connaissances sur la MII se sont élargies et que les options de traitement se sont multipliées, nous nous sommes demandé de quelles façons l’expérience du patient pourrait avoir changé. Par l’intermédiaire de nos conférences MauxdeventreMC récentes données partout dans le pays, de tables rondes pour les patients et d’appels publics pour des rétroactions, nous avons demandé aux patients : « Comment est-ce de vivre avec la MII aujourd’hui au Canada? » Des recherches récentes suggèrent que la MII touche actuellement environ 233 000 Canadiens. Nous vous présentons ici deux de ces voix.
Paul
Paul, qui habite en Ontario, a reçu un diagnostic de la maladie de Crohn (MC) en 1993, à l’âge de 46 ans, et a subi une résection du côlon l’année d’après. Aujourd’hui, les chirurgiens retirent parfois des sections du tube digestif gravement touchées par cette maladie, mais seulement en dernier ressort, habituellement dans des cas de prise en charge médicale ratée ou de complications. La MC est malheureusement sujette à un taux de récurrence élevé même à la suite de l’ablation chirurgicale de toute maladie visible ou microscopique. Au cours de la fin des années 1990, Paul a connu différents niveaux de rémission tandis qu’il prenait des médicaments 5-ASA, y compris Pentasa® et Asacol®, lesquels sont encore utilisés couramment aujourd’hui.
En 2001, Paul a subi une deuxième chirurgie. Dans la MC, une communication anormale ressemblant à un tunnel entre l’intestin et la peau (fistule) peut se produire près de l’ouverture du rectum, entre les anses intestinales dans l’abdomen ou entre l’intestin et la paroi abdominale, surtout après une chirurgie. En 2006, Paul a développé une fistule, marquant le début de ce qu’il décrit comme « une période très douloureuse » de sa MC, lors de laquelle il développa encore d’autres fistules et subit d’autres chirurgies. Son équipe de soins de santé décida en fin de compte que retirer d’autre tissu intestinal était nécessaire et pratiquer une iléostomie (intervention chirurgicale lors de laquelle le bout du petit intestin est passé à travers une ouverture pratiquée dans la paroi abdominale) constituait la meilleure option pour contrôler l’activité de la maladie chez Paul.
« Un mois ou deux après mon retour à la maison [mon gastro-entérologue] m’a prescrit Remicade. Ce médicament a bien fonctionné pour moi et dans l’espace de quelques mois j’avais guéri suffisamment pour subir une inversion de stomie », nous a affirmé Paul. Remicade® est un puissant médicament biologique qui est arrivé sur le marché canadien en 2001. Aujourd’hui, Remicade® et un autre produit biologique, Humira®, sont tous deux disponibles pour le traitement des cas graves de la maladie de Crohn.
Paul a expliqué : « Depuis cette période très sombre, j’ai été chanceux de pouvoir guérir complètement et j’ai maintenant une très bonne qualité de vie. J’ai développé des anticorps contre Remicade qui causent une réaction légère lors de chaque perfusion, mais ma santé reste relativement bonne et je profite une fois de plus d’une vie pleine. »
Mary Anne
Le parcours de Mary Anne avec la MII a débuté en 2008 à la suite d’un diagnostic de colite ulcéreuse (CU). Contrairement à la maladie de Crohn, la CU se manifeste seulement dans le côlon et commence toujours à l’anus, l’activité de la maladie progressant de façon continue vers le haut; l’inflammation ne touche que la muqueuse interne (au contraire de la maladie de Crohn, dans laquelle l’inflammation peut se produire dans toute l’épaisseur de la paroi intestinale). La CU peut tout de même être grave chez certains patients, comme c’est le cas pour Mary Anne qui nécessite des perfusions régulières de Remicade® pour contrôler l’activité de la maladie. En plus de s’inquiéter de son avenir et des effets à long terme de son traitement, Mary Anne a des craintes concernant l’accès aux médicaments. Elle voyage plus de 120 km toutes les deux ou trois semaines pour obtenir sa perfusion de Remicade®. « Non seulement l’accès à ce médicament est-il difficile pour les résidents en région rurale, a-t-elle expliqué, mais l’accès aux spécialistes l’est également. » Elle doit voyager plusieurs heures afin de consulter un spécialiste GI et subit des frais de déplacement et de logement pour chaque visite.
Les médicaments biologiques tels que Remicade® et Humira® étant considérablement plus coûteux à mettre au point et à produire que des médicaments contre la MII appartenant à des classes antérieures, ils coûtent très cher et ne figurent pas sur la liste des médicaments assurés de chaque province. En Colombie-Britannique où habite Mary Anne, les patients doivent répondre à des critères précis afin d’être couverts par la BC PharmaCare pour Remicade® et bien que les critères d’admissibilité soient typiques, ils varient énormément d’une région à l’autre du pays. Mary Anne s’est posé ces questions : « Pourquoi certaines personnes seraient-elles admissibles à recevoir un médicament tandis que d’autres ne le seraient pas? On m’a accordé un appui financier pour une période d’un an, mais que se passera-t-il si en étudiant mon dossier à nouveau l’appui n’est pas renouvelé? Est-ce que je devrai cesser de prendre le médicament? Cela est-il juste? Devrait-on vraiment avoir à parler d’équité lorsqu’il est question de soins de la santé? »