Alimentation et cancer de l’estomac : Prévention

L’alimentation et les facteurs liés au mode de vie jouent un rôle majeur dans la prévention et la gestion du cancer, y compris le cancer de l’estomac. Le cancer de l’estomac est la troisième cause de mortalité liée au cancer1 et, malheureusement, il est décelé souvent trop tard, alors que le cancer a déjà progressé. Le présent article examine les facteurs liés au mode de vie qui peuvent aider à prévenir le cancer de l’estomac et ceux qui pourraient contribuer à son développement. Il met l’accent sur des stratégies pratiques, appuyées par des données probantes, que vous pouvez utiliser dans votre vie quotidienne pour aider à réduire le risque de cancer de l’estomac. Si une approche plus individualisée vous intéresse, veuillez consulter un diététiste, lequel pourra créer un plan nutritionnel détaillé pour répondre à vos besoins particuliers.

Stratégies de prévention par l’alimentation

Les aliments et l’alimentation sont notoirement difficiles à étudier en raison d’une multitude de facteurs de confusion et, bien que de nombreux liens aient été établis, il est difficile de savoir exactement ce qui pourrait aider ou nuire à la prévention du cancer. Cela dit, quelques thèmes clés sont récurrents, notamment les effets protecteurs d’un apport abondant de fruits et légumes et les effets nocifs probables d’une consommation excessive de viande rouge et de viande transformée. Les renseignements suivants proviennent principalement des lignes directrices internationales actuelles sur les stratégies de prévention primaire et secondaire du cancer de l’estomac, publiées dans le Journal of Gastroenterology and Hepatology en 2020.1

Sel

Un apport élevé en sel a été lié à un risque accru de cancer de l’estomac — il est associé à un risque accru d’inflammation dans l’estomac (gastrite atrophique) pouvant entraîner des modifications précancéreuses des cellules qui tapissent l’estomac (métaplasie intestinale).2,3,4 Il va sans dire que le sel améliore le goût des aliments, et, bien que vous n’ayez pas à l’éviter complètement, songez à réduire son utilisation. Vous pouvez rehausser la saveur des aliments au moyen d’herbes et d’épices anti-inflammatoires, telles que la poudre de cari, le persil et la poudre d’ail, ou à l’aide de citron, de lime, de vinaigre et de racine de gingembre. Vous pouvez même essayer de nouvelles méthodes de cuisson comme la caramélisation et le rôtissage. Si vous ne mangez que des légumes bouillis, vous ne savez pas ce que vous manquez!

Ail

Il existe de nombreuses études sur l’ail, bon nombre d’entre elles se consacrant spécifiquement à la consommation d’ail ou aux suppléments d’ail en lien avec le risque de cancer de l’estomac et sa progression. Jusqu’à présent, les résultats sont controversés. L’ail contient des composés organo-sulfurés qui peuvent aider à ralentir ou à prévenir le développement du cancer et à modifier son risque.5 Les résultats de deux grandes études de cohortes prospectives menées aux États-Unis, la Nurses’ Health Study comptant 77 086 femmes et la Health Professionals Follow-up Study comptant 46 398 hommes, n’ont pas établi de lien entre la réduction du risque de cancer de l’estomac et une consommation accrue d’ail.5 L’ail pourrait offrir des bienfaits à cet égard, mais, jusqu’à maintenant, les preuves sont insuffisantes pour nous permettre de corroborer cette déclaration. Si vous aimez cuisiner avec de l’ail et que vous le tolérez bien, continuez à l’utiliser dans de nouvelles recettes ou recherchez-le dans des produits comme le pesto qui en contient une quantité abondante. Essayez d’ajouter du pesto aux œufs brouillés, au poisson, aux pâtes et aux soupes.

Alcool, café et thé vert

Une consommation modérée ou importante d’alcool est associée à une augmentation significative du risque de cancer de l’estomac, ce qui peut en partie être attribué aux effets toxiques locaux de l’alcool agissant directement sur les cellules qui tapissent l’estomac.6 Pour ce qui est du café et du thé vert, les recherches n’offrent pas de résultats concluants. À l’heure actuelle, il n’existe donc pas de recommandations à l’appui d’une consommation réduite de café ou d’une consommation accrue de thé vert. Cependant, le thé vert contient un antioxydant puissant et bénéfique, l’épigallocatéchine gallate (EGCG), qui protège contre les dommages cellulaires. Si vous aimez thé vert, continuez d’en boire!

Légumes, fruits et régime méditerranéen

Certaines études ont révélé l’existence d’une association significative entre une forte consommation de fruits et légumes et la prévention du cancer de l’estomac, tandis que d’autres n’ont pas obtenu de résultats aussi définitifs. Si vous fumez, vous pourriez tirer des avantages à intégrer une plus grande quantité de fruits et légumes dans votre régime, puisqu’il a été démontré que leurs effets protecteurs sont encore plus importants que chez les non-fumeurs.7 Il est intéressant de noter que les fibres alimentaires peuvent aider à neutraliser les nitrites cancérigènes.8 Une étude a démontré que l’ajout supplémentaire de 10 g de fibres alimentaires par jour (la quantité retrouvée dans deux poires) diminuait de 44 % le risque de cancer de l’estomac.9 Il est évident qu’une consommation élevée de fruits et légumes fournit des bienfaits généraux pour la santé, alors continuez d’en profiter chaque jour. Le régime méditerranéen, qui est riche en fruits et légumes, et pauvre en viandes rouges et en viandes transformées, a été associé à une réduction significative du risque de cancer de l’estomac;10 il peut donc être une option saine et délicieuse.

Agrumes

Les agrumes semblent conférer un effet protecteur contre le cancer de l’estomac, probablement en raison de leur forte teneur en flavonoïdes. Envisagez donc de consommer plus souvent une variété d’agrumes, notamment des oranges, des tangerines, des citrons, des limes et des pamplemousses. Il est à noter que les pamplemousses peuvent être nocifs lorsqu’ils sont pris avec certains médicaments; consultez votre médecin ou votre pharmacien pour vérifier si leur consommation est sûre pour vous. Le citron, en revanche, est un ingrédient simple et polyvalent que vous pouvez consommer plus souvent. J’aime ajouter du citron à de nombreux aliments, y compris le poisson, les sauces au tahini, le pain aux bleuets, le houmous et les vinaigrettes, mais vous pouvez aussi tout simplement le presser dans de l’eau ou du thé. Tout compte!

Viande rouge

Un apport élevé en viande rouge et en viande transformée est associé à un risque accru de cancer de l’estomac, tout comme la viande fumée ou carbonisée. Les viandes transformées contiennent habituellement des nitrites, qui peuvent former des composés cancérigènes dans l’organisme. Il peut être bénéfique de réduire votre consommation de viande rouge, en particulier les viandes transformées qui contiennent des nitrites. Vous pouvez remplacer ces viandes par d’autres sources de protéines, comme les œufs, le poulet, le poisson, les fruits de mer, le tofu, le tempeh et les légumineuses, comme les pois et le houmous. Personnellement, j’aimerais qu’il y ait plus d’études sur les différences entre la viande rouge provenant d’animaux nourris à l’herbe, la viande sauvage ou la viande biologique, et la viande rouge traditionnelle, car je soupçonne fortement que ce que les animaux consomment détermine si leur viande peut nous aider ou nous nuire.

Suppléments de vitamines et de minéraux

Les vitamines A, C et E, et le minéral sélénium sont tous des antioxydants qui ont été étudiés dans la prévention et le traitement du cancer de l’estomac. Une supplémentation à faible dose en vitamine A (1,5 mg/j), vitamine C (100 mg/j) et vitamine E (10 mg/j) a été associée à une réduction du risque de cancer de l’estomac.11 Une étude de suivi des résultats d’un essai contrôlé randomisé qui s’est déroulé de 1995 à 2017 a démontré que la supplémentation en vitamines C et E, et en sélénium entraînait une réduction significative de la mortalité due au cancer de l’estomac. Au vu de ces résultats, une supplémentation à plus long terme pourrait être bénéfique pour les personnes présentant un risque accru de cancer de l’estomac.12

Conclusion

Il existe de nombreuses stratégies nutritionnelles potentielles à prendre en compte dans la prévention du cancer de l’estomac. La majorité de ces stratégies favorisent une bonne santé générale par la consommation accrue d’aliments riches en fibres tels que les fruits et légumes, dont l’ail et les agrumes, et par la consommation réduite d’alcool, de sel et de viandes rouges et transformées. Comme toujours, d’autres recherches sont requises, mais il n’y a certainement pas de mal à apporter certains de ces changements à votre mode de vie pour commencer à optimiser votre santé dès aujourd’hui.


Anne-Marie Stelluti, R.D.
Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 217 – 2021
1. Eusebi LH et al. Gastric cancer prevention strategies: A global perspective. Journal of Gastroenterology and Hepatology. 2020; 35: 1495-1502.
2. Dias-Neto M et al. Salt intake and risk of gastric intestinal metaplasia: systematic review and meta-analysis. Nutr. Cancer 2010; 62: 133-47.
3. Song JH et al. High salt intake is associated with atrophic gastritis with intestinal metaplasia. Cancer Epidemiol. Biomarkers Prev. 2017; 26: 1133-8.
4. Shikata K et al. A prospective study of dietary salt intake and gastric cancer incidence in a defined Japanese population: the Hisayama study. Int J Cancer. 2006; 119 (1): 196-201.
5. Hanseul K et al. Garlic intake and gastric cancer risk: results from two large prospective US cohort studies. Int J Cancer. 2018; 143(5): 1047-1053.
6. He Z et al. Association between alcohol consumption and the risk of gastric cancer: a meta-analysis of prospective cohort studies. Oncotarget. 2017; 8: 84459-72.
7. Hansson LE et al. Tobacco, alcohol, and the risk of gastric cancer. A population-based case-control study in Sweden. Int. J. Cancer. 1994; 57: 26-31.
8. Moller ME et al. A possible role of the dietary fibre product, wheat bran, as a nitrite scavenger. Food Chem Toxicol. 1988; 26(10): 841-5.
9. Zhang Z et al. Dietary fiber intake reduces risk for gastric cancer: a meta-analysis. Gastroenterology. 2013; 145(1): 113-120.
10. Buckland G et al. Adherence to a Mediterranean diet and risk of gastric adenocarcinoma within the European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition (EPIC) cohort study. Am J Clin Nutr. 2010; 91: 381-90.
11. Kong P et al. Vitamin intake reduce the risk of gastric cancer: meta-analysis and systematic review of randomized and observational studies. PLoS ONE. 2014; 9: e116060.
12. Wen-King L, et al. Effects of Helicobacter pylori treatment and vitamin and garlic supplementation on gastric cancer incidence and mortality: follow-up of a randomized intervention trial. BMJ. 2019; 366.