Intolérant aux produits laitiers? Vous pourriez tolérer le lait A2

Je me souviens d’une époque où l’on ne pouvait choisir qu’une seule sorte de lait à l’épicerie, le lait de vache ordinaire. Oui, il était offert en différents pourcentages de matières grasses, et il y avait peut-être quelques options sans lactose, mais c’est tout. Aujourd’hui, il existe toute une variété de lait et de substituts du lait; il peut être difficile, même pour les diététistes, de se tenir au courant de tous les nouveaux produits! Vous avez peut-être remarqué un ajout récent au rayon des produits laitiers : le lait A2, un type spécial de lait de vache qui, selon des preuves, est mieux toléré que le lait de vache ordinaire. Des recherches relativement récentes suggèrent que ce n’est peut-être pas le lactose dans le lait qui déclenche des symptômes intestinaux chez certaines personnes; celles chez qui l’on soupçonne une intolérance au lactose toléreraient possiblement très bien le lait A2. Poursuivez votre lecture pour découvrir plus de détails sur le lait A2, entre autres comment il diffère du lait de vache ordinaire et pourquoi vous pourriez être en mesure de le tolérer, même si vous souffrez d’une intolérance au lactose.

Intolérance au lactose

L’intolérance au lactose est souvent mise en cause dans le déclenchement de problèmes digestifs suivant la consommation de lait, ce qui est en effet le cas pour bon nombre de personnes. Le lactose est le sucre naturellement présent dans le lait qui peut déclencher des symptômes chez les personnes souffrant d’un trouble digestif ou chez celles ayant une prédisposition génétique à l’intolérance au lactose. Le lactose fait également partie du groupe de sucres FODMAP pouvant déclencher des symptômes intestinaux chez certaines personnes atteintes du syndrome de l’intestin irritable. Les symptômes liés à l’intolérance au lactose se manifestent généralement dans les 15 minutes à une heure suivant la consommation d’aliments riches en lactose, tels que le lait ou la crème glacée. Ils comprennent des sensations de ballonnement, des crampes et des selles molles. Les sources à plus faible teneur en lactose, comme le yogourt, le cheddar vieilli et le beurre, sont habituellement bien tolérées par les personnes souffrant d’une intolérance au lactose; il n’est donc pas nécessaire pour elles de les éviter. La taille des portions est également importante — il est peu probable que quelques cuillères à soupe de lait ajoutées au café déclenchent des symptômes chez une personne souffrant d’une intolérance au lactose.

Le lait sans lactose est additionné de l’enzyme lactase, laquelle décompose les molécules de lactose, de sorte que l’on boive essentiellement du lactose prédigéré. Le lait sans lactose a un goût un peu plus sucré que le lait ordinaire, puisque le lactose (sucre) a été décomposé. Il est intéressant de noter que la consommation d’un verre de lait ordinaire contenant du lactose peut aider une personne intolérante au lactose à résoudre un problème de constipation. Bien que cette méthode ne soit pas couramment utilisée dans un contexte clinique, elle est souvent efficace et peut être un outil stratégique à envisager par les personnes souffrant de constipation chronique.

Protéines dans le lait de vache

Le lait de vache contient environ 20 % de protéines de lactosérum et 80 % de protéines de caséine. La bêta-caséine (B-caséine) se trouve en abondance dans le lait de vache et peut être classée en deux types : la B-caséine A1 et la B-caséine A2. À l’origine, le lait de vache contenait uniquement la protéine B-caséine A2. Environ de 5 000 à 10 000 ans passés, des mutations génétiques chez les vaches du nord de l’Europe ont entraîné l’apparition de la B-caséine A1, de sorte que le lait de vache contient désormais un mélange de protéines B-caséine A1 et A2.1 La protéine A1 semble déclencher des symptômes intestinaux et une inflammation, alors que la protéine A2 n’a pas cet effet. Vous pouvez maintenant trouver du lait A2 dans votre épicerie qui ne contient que la protéine de B-caséine A2, contrairement au lait de vache ordinaire, qui contient un mélange de protéines de B-caséine A1 et A2. Le lait ne contenant que la B-caséine A1 n’est pas actuellement disponible sur le marché, et je ne crois pas qu’il le deviendra, étant donné les résultats provenant des recherches dans ce domaine.

Comparons le lait A1 au lait A2

La protéine B-caséine A1 déclenche des symptômes intestinaux et imite les symptômes de l’intolérance au lactose. Lorsque la B-caséine A1 est décomposée et digérée elle entraîne la production de bêta-casomorphine-7 (BCM-7), un peptide pouvant déclencher des symptômes intestinaux et une inflammation de l’intestin. La BCM-7 est une molécule pro-inflammatoire qui, selon des preuves, déclenche une inflammation par l’entremise de diverses voies.2 Une étude transversale randomisée, contrôlée et à double insu, publiée en 2016 dans le Nutrition Journal, a étudié les effets du lait A2 par rapport au lait contenant également la protéine A1 sur les symptômes intestinaux et la cognition de 45 personnes en Chine ayant une intolérance au lactose autodéclarée.3 Les chercheurs ont demandé aux participants de boire deux tasses de lait par jour (lait A1 ou A2) pendant 14 jours et, après une période d’élimination, de boire deux tasses par jour du lait qu’ils n’avaient pas consommé la première fois, pendant 14 jours additionnels, tout en surveillant l’apparition de symptômes. Il est important de noter que les deux sortes de lait contenaient la même quantité de lactose, la seule différence étant par rapport aux protéines de lait A2 et A1.

Les chercheurs ont utilisé une pilule intelligente pour évaluer les effets sur l’intestin ainsi que les marqueurs sanguins de l’inflammation. Ils ont surveillé les symptômes d’inconfort digestif suivant la consommation de lait : ballonnements, douleur abdominale, flatulence, lourdeur d’estomac et borborygme, c’est-à-dire bruits ou gargouillements produits par l’estomac et les intestins. Les chercheurs ont découvert que le lait A2 ne déclenchait pas d’effets secondaires négatifs, contrairement au lait A1. Le lait A1 augmentait les symptômes intestinaux et l’inflammation gastro-intestinale, retardait le transit, diminuait la vitesse et la précision du traitement cognitif (ce qui serait secondaire à l’inflammation) et diminuait la production fécale d’acides gras à chaîne courte (AGCC). Les AGCC sont des sous-produits bénéfiques de la fermentation qui sont naturellement produits dans le côlon (gros intestin). Leurs effets anti-inflammatoires et leur contribution à la santé et au bon fonctionnement des cellules qui tapissent le côlon ont été démontrés. Chose positive, le lait A2 ne réduisait pas les AGCC fécaux. Cette étude était de petite envergure, mais elle compte parmi de nombreuses études publiées sur le sujet; ces informations méritent d’être prises en compte lorsque vous faites vos propres choix alimentaires.

Lait A2

Le lait A2 est une option pour les personnes qui désirent boire du lait ordinaire, mais qui ont connu dans le passé des problèmes digestifs après en avoir bu. Il est possible que les personnes chez qui l’on soupçonne une intolérance au lactose ou qui ont une intolérance autodéclarée puissent tolérer le lait A2 sans problème. Ce lait est maintenant disponible sur le marché, dans la plupart des épiceries au Canada. Il est offert dans différents pourcentages de matières grasses, tout comme le lait de vache ordinaire. Le seul désavantage du lait A2 par rapport au lait ordinaire, c’est qu’à titre de produit relativement nouveau, son prix est plus élevé; celui-ci peut tout de même en valoir la peine pour vous. J’espère que les prix baisseront bientôt, au fur et à mesure que les gens découvrent ce lait.

Conclusion

Le nouveau lait A2 est maintenant disponible sur le marché canadien et l’on a démontré qu’il est bien toléré par les personnes ayant souffert dans le passé de troubles digestifs suivant la consommation de produits laitiers. Le lait contenant la protéine A1 déclenche une inflammation et des problèmes digestifs qui imitent les symptômes de l’intolérance au lactose; il doit donc être évité par les personnes souffrant d’un trouble digestif. Bien que le lait A2 soit plus cher que le lait ordinaire, il peut s’avérer une bonne option pour les personnes désirant vraiment boire du lait ordinaire et pour celles qui veulent bénéficier d’un ajout de protéines, de calcium et de vitamine D à leur alimentation. Si vous êtes aux prises avec une intolérance au lactose soupçonnée ou autodéclarée, il est possible que ce soit la protéine B-caséine A1 du lait, et non le lactose, qui déclenche vos symptômes. Vous pourriez donc envisager d’essayer le lait A2 comme solution de rechange.


Anne-Marie Stelluti, R.D.
Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 220 – 2021
Photo : © Tanya Sid | Bigstockphoto.com
1. Bentivoglio D et al. Is there a promising market for A2 Milk? Analysis of Italian Consumer Preferences. Sustainability. 2020;12: 6763.
2. Trivedi MS et al. Food-derived opioid peptides inhibit cysteine uptake with redox and epigenetic consequences. J Nutr Biochem. 2014;25:1011-8.
3. Jianqin S et al. Effects of milk containing only A2 beta casein versus milk containing both A1 and A2 beta casein proteins on gastrointestinal physiology, symptoms of discomfort, and cognitive behavior of people with self-reported intolerance to traditional cow’s milk. Nutrition Journal. 2016; 15:35.