Le SII en 2019

Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est très fréquent dans le monde entier, et nous en savons encore très peu à son sujet. Il y a souvent beaucoup d’études en cours qui visent à en apprendre davantage sur cette maladie. Dans le présent article, nous discutons de quelques-unes des recherches récemment publiées sur le SII et menées dans diverses régions géographiques.

Le régime appauvri en FODMAP améliore la qualité de vie

Le régime appauvri en FODMAP est un moyen populaire de traiter le SII. Il consiste à réduire la quantité de glucides fermentescibles (en particulier les oligosaccharides, disaccharides, monosaccharides et polyols fermentescibles) dans l’alimentation, étant donné que ceux-ci peuvent aggraver les symptômes chez les personnes atteintes du SII. Généralement, l’on réduit ces aliments à une quantité minime pendant un certain temps, pour ensuite les réintroduire graduellement jusqu’à un niveau tolérable. Nous savons qu’un régime appauvri en FODMAP suivi de façon continue peut atténuer les symptômes tels que les ballonnements et la douleur abdominale. Or, une nouvelle étude provenant de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie1 a entrepris de mesurer les effets d’un régime appauvri en FODMAP sur d’autres aspects de la vie. Chez les 111 patients inscrits à l’étude, l’on a évalué la qualité de vie, l’anxiété/la dépression, la fatigue, la qualité du sommeil, le bonheur et les symptômes digestifs, et ce, avant d’introduire le régime appauvri en FODMAP; ces éléments ont ensuite été évalués six semaines et six mois après le début du régime. Ils ont constaté des améliorations importantes pour chacun des éléments mesurés, y compris la qualité de vie globale, à la fois à la sixième semaine et au sixième mois. Plus précisément, les chercheurs ont trouvé une corrélation entre l’atténuation des symptômes GI et les autres améliorations. Cela démontre que les bienfaits du régime appauvri en FODMAP s’étendent au-delà de l’atténuation des symptômes GI.

Ballonnements et gravité des symptômes

Une étude israélienne2 menée auprès de 484 personnes a comparé les individus atteints du SII avec des témoins sains, puis a divisé davantage le groupe du SII en ceux souffrant de ballonnements et ceux n’en souffrant pas. Les chercheurs ont constaté que la gravité des symptômes, de la douleur, de la fibromyalgie et de l’anxiété, et la quantité de restrictions alimentaires étaient accrues chez les patients souffrant de ballonnements comparativement à ceux n’en souffrant pas. Les auteurs de l’étude suggèrent que les médecins devraient tenir compte de ces aspects lorsqu’ils traitent des personnes aux prises avec le SII afin de s’assurer que celles-ci reçoivent le meilleur traitement possible pour leur situation particulière.

SII et SPM

En Iran, des chercheurs désiraient savoir s’il existe un lien entre l’ingestion d’oligo-éléments (zinc et cuivre) et le syndrome prémenstruel (SPM), les menstruations/crampes douloureuses (dysménorrhée) et le SII, toutes des manifestations courantes chez les femmes. L’étude3 a comparé quatre groupes d’adolescentes : 67 filles souffrant de SPM, 161 atteintes de dysménorrhée, 146 aux prises avec le SPM et la dysménorrhée, et 74 non touchées par l’une ou l’autre des affections. Ils ont ensuite utilisé les critères de Rome III pour diagnostiquer le SII chez les sujets, et ont mesuré leur taux sanguin de zinc et de cuivre. Ils n’ont trouvé aucune différence importante à l’égard des niveaux sanguins d’oligo-éléments entre les groupes. Toutefois, les filles souffrant de SPM et de dysménorrhée étaient plus susceptibles d’être atteintes de SII que les filles n’en souffrant pas. Ils ont diagnostiqué le SII chez 14 % des filles aux prises avec le SPM, 20 % de celles atteintes de dysménorrhée, 17 % de celles aux prises avec les deux, et seulement 8 % de celles non touchées par ces troubles. Des recherches antérieures ont donné des résultats semblables, portant à croire qu’il pourrait exister un lien entre les troubles menstruels et le SII chez les femmes.

Structure du cerveau

Dans l’article Gray Matter Changes in IBS (La matière grise change avec le SII – disponible en anglais seulement) du numéro 176 du bulletin Inside Tract®, nous avons rapporté que certaines recherches démontrent des différences à l’égard de la structure du cerveau entre les personnes atteintes du SII et celles qui ne le sont pas. Une nouvelle étude provenant des États-Unis4 cherchait à savoir si ces différences étaient également évidentes chez les enfants souffrant du SII. Les chercheurs ont comparé l’imagerie cérébrale de 32 filles atteintes du SII à celles de 26 filles non touchées par le SII, afin de déterminer s’il existait des différences entre les deux groupes par rapport au volume de la matière grise et de la connectivité fonctionnelle en état de repos. Ils ont ensuite cherché des corrélations entre ces mesures et les seuils de douleur des filles mesurés en laboratoire. Ils ont constaté que le volume de matière grise des filles atteintes du SII était inférieur dans certaines régions du cerveau, y compris le cortex préfrontal, les noyaux gris centraux et le cortex mi-cingulaire antérieur, à celui des filles non atteintes du SII. Les filles aux prises avec le SII affichaient également une connectivité fonctionnelle altérée entre certains réseaux cérébraux. De plus, il y avait des différences marquées sur le plan de la sensibilité à la douleur entre les personnes atteintes du SII et celles qui ne l’étaient pas, une corrélation ayant été établie entre les changements cérébraux et une sensibilité accrue à la douleur. Cette étude suggère que les changements structuraux du cerveau que l’on observe parfois chez les personnes souffrant du SII sont probablement déclenchés tôt dans le développement du cerveau.

Événements négatifs

Dans le passé, certaines recherches ont établi un lien entre la gravité du SII et les troubles de santé mentale, comme l’anxiété et les troubles de l’humeur. Dans le cadre d’une autre étude américaine5, des chercheurs se sont penchés sur les liens entre les événements stressants/négatifs perçus à l’âge adulte et le SII. Ils ont comparé 129 patients atteints du SII à 108 personnes en bonne santé, recueillant de l’information sur la présence et les effets d’événements à l’âge adulte, les scores de gravité du SII et la qualité de vie liée au SII. Ils ont constaté que les personnes souffrant du SII déclarent plus d’événements négatifs dans leur vie et que les personnes vivant davantage d’événements négatifs sont plus susceptibles de développer le SII. De plus, une augmentation des événements négatifs de la vie entraîne une aggravation des symptômes, une détérioration de la qualité de vie et un dérèglement de la réaction au stress chez les personnes touchées par le SII. Les résultats de cette étude illustrent que le traitement de ces aspects de la santé mentale pourrait entraîner une atténuation des symptômes du SII et offrir une meilleure qualité de vie.

Conclusion

Le syndrome de l’intestin irritable est très commun, mais il existe encore de nombreuses lacunes dans nos connaissances sur cette affection. La science médicale cherche encore à déterminer ce qui cause le SII, ce qui l’aggrave et ce que nous pouvons faire pour prévenir ou traiter cette maladie. Les chercheurs publient fréquemment de nouveaux articles qui peuvent nous aider à mieux comprendre le SII. Nous savons également que le microbiome – les bactéries et autres microorganismes qui colonisent l’intestin – joue probablement un rôle dans le SII.


Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 209 – 2019
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1. Kortlever TL et al. Low-FODMAP Diet Is Associated With Improved Quality of Life in IBS Patients—A Prospective Observational Study. Nutrition in Clinical Practice. 2019. doi: 10.1002/ncp.10233.
2. Hod K et al. Bloating in Irritable Bowel Syndrome Is Associated with Symptoms Severity, Psychological Factors, and Comorbidities. Digestive Diseases and Sciences. 2018. doi: 10.1007/s10620-018-5352-5.
3. Bahrami A et al. The Association of Trace Elements With Premenstrual Syndrome, Dysmenorrhea and Irritable Bowel Syndrome in Adolescents. European Journal of Obstetrics & Gynecology and Reproductive Biology. 2019;233:114-119. doi: 10.1016/j.ejogrb.2018.12.017.
4. Bhatt RR et al. Altered Brain Structure and Functional Connectivity and Its Relation to Pain Perception in Girls With Irritable Bowel Syndrome. Psychosomatic Medicine. 2019;81(2):146-154.
5. Parker CH et al. Negative Events During Adulthood are Associated With Symptom Severity and Altered Stress Response in Patients With Irritable Bowel Syndrome. Clinical Gastroenterology and Hepatology. 2019 Jan 4. pii: S1542-3565(19)30002-3. doi: 10.1016/j.cgh.2018.12.029.