SII et évitement alimentaire
Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est un trouble gastro-intestinal (GI) chronique et fonctionnel caractérisé par des douleurs abdominales, des ballonnements et une constipation ou une diarrhée. Ces symptômes peuvent être persistants et avoir des répercussions considérables sur la qualité de vie. Il existe trois sous-types distincts du SII : le SII-C qui occasionne principalement de la constipation; le SII-D qui occasionne principalement de la diarrhée; et le SII-M, un type mixte. Le SII peut toutefois être diagnostiqué sans sous-type.
Étant donné que certains aliments peuvent déclencher ou aggraver les symptômes chez bon nombre des personnes atteintes du SII, les traitements sont souvent axés sur des modifications à l’alimentation. Le régime alimentaire appauvri en FODMAP est l’une des options les plus courantes; cependant, chaque personne peut avoir des déclencheurs alimentaires différents et, donc, chacune peut avoir à supprimer des aliments spécifiques, que ce soit par elle-même ou avec l’aide d’un diététiste ou d’un médecin. Cependant, limiter des aliments à long terme peut entraîner des carences nutritionnelles et même aggraver les symptômes digestifs. Par exemple, certaines personnes trouvent que les aliments fibreux, tels que les légumes et les grains entiers, aggravent leurs symptômes; ceci pourrait les amener à supprimer ces aliments et à suivre un régime axé sur le pain blanc et la viande. Cependant, une alimentation pauvre en fibres peut avoir un effet négatif sur le fonctionnement du tube digestif et de son microbiome, ce qui peut aggraver les symptômes à long terme.
Une étude publiée en 20221 a porté sur la comparaison entre les patients atteints du SII qui limitaient ou évitaient les aliments et ceux qui ne le faisaient pas, afin de déterminer si leur expérience du SII était différente. Les chercheurs ont étudié 955 personnes atteintes du SII, dont 27 % souffraient du SII‑C, 39 % du SII‑D et 34 % du SII mixte ou non sous-typé. Les patients étaient âgés de 18 à 75 ans et 75 % étaient des femmes. Aucun des sujets ne suivait un régime alimentaire spécifique et les chercheurs ont exclu toute personne souffrant d’une maladie physique ou psychiatrique grave, de la maladie cœliaque ou d’allergies alimentaires connues, de même que celles ayant une affection, ayant subi une intervention chirurgicale susceptible d’influencer la fonction gastro-intestinale, ou étant aux prises avec toute autre maladie pouvant expliquer leurs symptômes.
Les chercheurs ont constaté que 26 % des participants, souvent, ne mangeaient pas lorsqu’ils avaient faim, que 54 % évitaient fréquemment certains aliments et que 31 % trouvaient souvent les aliments peu agréables, notamment en raison de leur SII. Les personnes présentant l’ensemble de ces comportements constituaient 13 % des répondants au sondage; les auteurs de l’étude ont défini ce groupe comme celui chez qui l’évitement et la restriction alimentaires étaient les plus graves. Ces personnes connaissaient une qualité de vie nettement inférieure et présentaient des symptômes digestifs, psychologiques et physiques plus graves que les personnes ne s’imposant pas de restrictions alimentaires. Les personnes atteintes du SII‑D étaient plus susceptibles de faire état d’un évitement et d’une restriction alimentaires graves, ce comportement étant particulièrement marqué chez celles qui avaient signalé un plus grand nombre de selles molles. Les personnes atteintes du SII‑C étaient moins susceptibles d’éviter et de restreindre leur alimentation.
Un sous-ensemble de répondants a tenu des journaux alimentaires détaillés. Les chercheurs ont comparé ces 20 personnes qui évitaient et limitaient fortement leur consommation d’aliments aux 226 autres qui ne le faisaient pas. Les personnes du groupe restrictif consommaient moins de calories en moyenne (1 714 kcal contre 2 102 kcal), moins de protéines (65 g contre 80 g) et moins de glucides (168 g contre 213 g). De plus, elles consommaient moins de fibres (15 g contre 19 g) ce qui est particulièrement préoccupant en ce qui concerne la santé gastro-intestinale. Autre facteur inquiétant, les apports en calcium, zinc, thiamine et folate étaient faibles et inférieurs aux apports quotidiens recommandés, rendant donc ces personnes susceptibles de développer des carences. Pourtant, l’indice de masse corporelle n’était pas plus faible dans le groupe restrictif, mais les chercheurs ne disposaient pas d’informations permettant de savoir si ces personnes avaient perdu du poids avant le début de l’étude en raison des changements alimentaires apportés en vue de gérer le SII.
Quoique les modifications au régime alimentaire puissent être un outil utile dans le traitement du SII, il est important de trouver le bon équilibre entre l’atténuation des symptômes et la prévention de complications. Si vous éliminez certains aliments ou groupes d’aliments, ou si vous mangez moins que d’habitude, il serait bon de demander à votre médecin de vous prescrire des tests pour vérifier si vous souffrez de carences alimentaires. Vous pouvez également travailler avec un diététiste professionnel pour mettre en place un plan alimentaire qui évite ces aliments déclencheurs, mais qui est quand même nutritif et bon à long terme pour la santé intestinale.