Prévalence de la MII et coûts connexes

Le Canada affiche l’un des taux les plus élevés au monde de la maladie inflammatoire de l’intestin (MII) — principalement la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse — touchant près d’une personne sur 150. Les nombreuses études que nous avons menées sur les besoins non comblés des personnes vivant avec la MII démontrent que bon nombre d’entre elles sont toujours confrontées à des obstacles nuisant à l’obtention de soins continus et opportuns. Pourtant, la prévalence et le coût du traitement de la MII ne cessent de croître. De nouvelles recherches menées par de grandes universités des provinces de l’Ouest révèlent ce que cela représente pour les adultes habitant en Saskatchewan.1

Cette étude rétrospective axée sur la population fait état de données de santé provenant des exercices financiers de 1999-2000 à 2016-2017. Les données englobaient les congés d’hôpital, les services médicaux, l’utilisation de médicaments sur ordonnance et des renseignements provenant des systèmes d’enregistrement de la santé. Pour repérer les cas de MII, les auteurs ont utilisé les codes diagnostiques de la Classification internationale des maladies s’appliquant à la maladie de Crohn et à la colite ulcéreuse. Les individus devaient avoir eu de nombreux contacts avec un service de soins de santé en raison de leur diagnostic, et ce, pendant une période de couverture publique de deux ans au plus. Ils ont exclu de l’étude les personnes ayant bénéficié d’une couverture-médicaments par l’entremise de programmes fédéraux (c.‑à‑d., Premières nations, Inuits et militaires). Les autres personnes exclues étaient celles prenant des médicaments en vente libre ou des médicaments administrés à l’hôpital, et les jeunes de moins de 18 ans.

Entre 1999 et 2017, la prévalence de la MII en Saskatchewan a augmenté en moyenne de 3,3 % par année. En 1999, 201 personnes sur 100 000 ont reçu un diagnostic de maladie de Crohn. En 2017, ce chiffre est passé à 375 sur 100 000. Relativement à colite ulcéreuse, 135 personnes sur 100 000 ont reçu un diagnostic en 1999 et, à la fin de 2017, ce chiffre a bondi à 289 sur 100 000. Les cas de MII étaient plus nombreux chez les groupes d’âge plus avancé, comme ceux des personnes âgées de 50 ans et plus.

Coûts

En l’absence de remède à l’horizon ou de la garantie d’une solution thérapeutique unique, la MII demeure une maladie coûteuse et accablante pour les personnes touchées, leurs familles et leurs aidants, ainsi que pour nos systèmes de santé. En 1999, le coût total direct des soins de santé liés à la MII était de 7,8 millions de dollars, passant à 50,9 millions de dollars en 2017, avec ajustements tenant compte de l’inflation à des fins de comparaison. Les chercheurs ont établi ces totaux à partir des données de l’Institut canadien d’information sur la santé visant les séjours hospitaliers standard moyens, des coûts des services de médecins ainsi que des coûts des demandes de remboursement de médicaments pour la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse, ces derniers étant basés sur la liste des médicaments assurés de la Saskatchewan.

Du total des coûts directs des soins de santé pour la MII, 90 % est attribuable aux médicaments sur ordonnance, tandis que les 10 % restants sont dus aux frais d’hôpitaux et de médecins. Le coût moyen des ordonnances par personne est passé de 660 $ en 1999 à 6 530 $ en 2017. Les auteurs soulignent que la mosaïque de régimes d’assurance médicaments publics et privés au Canada et l’absence d’une couverture universelle des médicaments sur ordonnance sont des facteurs qui contribuent à l’augmentation des coûts des médicaments. Bien que l’origine du problème soit plus complexe, le gouvernement fédéral est en voie d’apporter des changements radicaux à sa façon de réglementer les prix des médicaments au Canada.

Les produits biologiques ont également été un facteur de coût important au cours des dernières années. Avant l’ère des médicaments biologiques, les hospitalisations et les interventions chirurgicales constituaient la majeure partie des dépenses. Cependant, celles-ci sont moins efficaces que les médicaments biologiques pour stabiliser la maladie. Malgré l’augmentation du nombre de cas de MII au fil des ans, les frais d’hospitalisation sont restés les mêmes, ce qui pourrait confirmer l’efficacité des médicaments biologiques à réduire la progression de la maladie et les hospitalisations.

Il convient de noter qu’après 2017, le coût des médicaments biologiques a considérablement diminué en raison de l’introduction des biosimilaires dans de nombreuses régions. Ceci pourrait donc influencer toute comparaison de suivi une fois que les politiques de substitution de biosimilaires seront entièrement en place au Canada.

Les auteurs de l’étude admettent qu’ils n’ont pas pris en compte le coût des services de laboratoire ambulatoires, tels que les prélèvements de sang et de selles, le dépistage et les soins fournis par les infirmières et autres professionnels de la santé. Il s’agit d’une lacune importante dans leur recherche. Afin d’accroître notre compréhension de la MII, les chercheurs recommandent de futures études englobant ces services ainsi qu’une évaluation des coûts indirects de cette maladie pour l’ensemble du Canada.


Publié pour la première fois dans le bulletin Du coeur au ventreMD numéro 218 – 2021
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1. sei JA et al. Increasing Prevalence and Direct Health Care Cost of Inflammatory Bowel Disease Among Adults: A Population-Based Study From a Western Canadian Province. Journal of Canadian Association of Gastroenterology. 2021;1‑10.