Ne blâmez pas le patient

Il est commun d’avoir tendance à porter des jugements hâtifs lorsque nous apprenons qu’une personne a reçu un diagnostic d’une quelconque maladie. Si quelqu’un est atteint d’un cancer, nous demandons : « Était-il fumeur? »; si quelqu’un souffre d’obésité, nous demandons : « N’a-t-il pas de volonté? »; si quelqu’un est infecté par le VIH, nous demandons : « A-t-il eu des rapports sexuels à risque? »; si quelqu’un est aux prises avec une dépendance et se retrouve sans abri, nous demandons : « Pourquoi ne se trouve-t-il pas un emploi? »; et si quelqu’un se présente à la salle d’urgence avec une entorse de la cheville, nous disons : « Tu devrais faire plus attention. »

Il y a quelques années, à un salon du bien-être, je travaillais au kiosque de la SCRI où l’on présentait des renseignements sur la maladie inflammatoire de l’intestin (MII). Un homme grand, en forme et chauve, s’est approché et a dit savoir que le remède contre la MII était de bien manger. Dans un de mes moments les plus insolents, je lui ai demandé s’il mangeait bien et il m’a répondu, d’un air prétentieux, « Bien sûr que oui! ». C’était un salon du bien-être, après tout. Alors, je lui ai demandé pourquoi il était toujours chauve! Il s’est éloigné avec un air confus. Matière à réflexion?

Peu importe la qualité de notre alimentation, nous connaissons tous des variations génétiques, des blessures, des maladies, le vieillissement et la mort. Quoiqu’une bonne alimentation soit un élément clé de la santé, ce n’est pas le seul. Les maladies et troubles ne sont pas guéris par une bonne alimentation, mais celle-ci peut souvent les améliorer. Alors, une infection ou une maladie peut quand même survenir malgré toutes les précautions que nous prenons pour consommer un régime équilibré.

L’exercice est également important, mais il faut éviter d’adopter une attitude discriminatoire envers une personne sédentaire. Elle pourrait connaître des problèmes non apparents, comme des douleurs chroniques, qui l’empêchent de bouger davantage.

La dépendance est un autre domaine sujet à bien des jugements. Nous devons considérer que tout comportement peut être expliqué et que de nombreux facteurs, dont la plupart sont liés à la santé mentale, contribuent à la dépendance.

Une personne est souvent impuissante à soigner son état sans attention médicale. Si quelqu’un se sent jugé en raison de son état de santé, il peut hésiter à aller faire soigner, ce qui éloigne encore plus la possibilité d’une résolution. Étant donné l’état de crise des soins de santé au Canada et dans le monde entier, il est de plus en plus difficile d’accéder à des soins primaires, et encore plus difficile d’obtenir des soins en santé mentale.

Parfois, une personne peut attendre des mois, voire des années, avant de demander de l’aide pour un problème de santé. Puisque ce type de retard peut aggraver une affection, il est préférable d’obtenir des soins rapidement. Malheureusement, nous vivons actuellement d’énormes stress en raison de la pandémie : notre système de santé public subit tellement de pressions qu’il est devenu tout à fait inadéquat, et est assujetti à d’importantes variances, et ce, d’un bout à l’autre du pays. Or, si nous comprenons bien qu’il existe des pressions dans le domaine des soins de santé, nous devons quand même prêter une attention toute particulière aux moyens d’y remédier.

La Société gastro-intestinale se soucie des patients en ce temps de pandémie. Nous avons donc entamé des conversations intimes avec ceux que nous servons et qui souffrent d’une variété d’infections, de maladies et de troubles qui portent atteinte à l’appareil digestif.

C’est une leçon d’humilité que de travailler avec des personnes souffrant d’une variété d’affections gastro-intestinales. Le parcours de chaque personne est clairement unique. Nous avons saisi certains des parcours les plus courants, mais nous sommes conscients qu’ils peuvent ne pas refléter votre expérience.

La dernière chose dont une personne malade a besoin, c’est d’être jugée. Nos semblables ont besoin d’attention et de compréhension. De soutien, non de critique. De bonté, non d’indifférence.


Gail Attara, présidente et PDG, Société gastro-intestinale
Publié pour la première fois dans le bulletin The Inside Tract® numéro 223
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