Quatre mythes sur les aliments et la nutrition
Pour ceux qui vivent avec une maladie ou un trouble gastro-intestinal (GI), le simple fait de manger peut devenir compliqué. Des carences nutritionnelles peuvent en résulter, et il peut y avoir des incertitudes par rapport aux aliments qui peuvent être consommés sans problème. Certaines maladies, comme la maladie de Crohn et la maladie cœliaque, empêchent le corps d’absorber certains nutriments de façon adéquate en raison d’inflammation ou d’autres perturbations du petit intestin. Dans d’autres affections GI, les symptômes, tels que la nausée et les vomissements ou l’appréhension de douleur dans le tube digestif, peuvent entraîner les personnes qui en souffrent à réduire la quantité de nourriture qu’elles consomment ou à modifier leur alimentation d’autres façons, même en éliminant des groupes alimentaires entiers, dans leur quête incessante de l’atténuation de leurs symptômes. Ces comportements peuvent donner lieu à un apport insuffisant en nutriments et c’est pourquoi nous conseillons à tous ceux aux prises avec une maladie ou un trouble GI de consulter un diététiste professionnel qui peut s’assurer que leur régime alimentaire répond à leurs besoins nutritionnels.
Il existe une abondance de conseils nutritionnels sur Internet, à la télévision, dans les livres et dans les revues. Bien que les allégations offertes soient sans fondement, plutôt que de consulter un diététiste de nombreuses personnes se tournent vers ces sources rapides d’information pour obtenir des conseils portant sur leurs besoins nutritionnels. Même votre meilleur ami pourrait essayer de vous convaincre de consommer certains aliments. À qui devez-vous vous adresser? À qui devez-vous faire confiance?
Nous avons mentionné dans des articles antérieurs que le gluten a souvent mauvaise réputation même s’il n’occasionne aucun problème chez les personnes qui ne souffrent pas de la maladie cœliaque ou d’une sensibilité au gluten. En tout, seulement de 6 à 7 % de la population souffrent de la maladie cœliaque ou d’une sensibilité au gluten.
Dans le présent article, nous passerons en revue les faits et les conjectures concernant certains mythes courants sur la nutrition.
MYTHE : Les aliments crus sont meilleurs que les aliments cuits
Vous avez peut-être entendu dire que les fruits et légumes frais sont plus sains que leurs équivalents cuits, puisque la cuisson détruit les nutriments.
Il est vrai que le fait de chauffer les aliments dans le processus de la cuisson peut détruire certains nutriments. La vitamine C est un composé plutôt instable et peut être endommagée lorsqu’exposée à un processus d’oxydation ou à une haute température. La méthode de cuisson peut aussi faire une différence. Certaines vitamines sont solubles dans l’eau, ce qui signifie qu’elles peuvent s’introduire dans l’eau lorsque les aliments sont cuits à l’eau ou à la vapeur. Dans ces cas, lorsque l’on jette l’eau après la cuisson, l’on jette aussi les vitamines. Cependant, si vous faites bouillir les légumes pour une soupe et que vous gardez l’eau pour le bouillon, vous conservez alors la plupart des bienfaits.4
D’autre part, certains nutriments sont plus biodisponibles lorsqu’ils sont cuits.5 La cuisson décompose les parois fibreuses des aliments végétaux, ce qui rend plus facile l’absorption de certains nutriments qui sont étroitement liés à des parties de la plante étant difficiles à digérer. Si vous cuisez des tomates, la quantité de lycopène et de phytonutriments étant biodisponible augmente.6 Il faut moins de tomates cuites que de tomates crues pour obtenir la même quantité de lycopène. Le lycopène est un antioxydant qui peut aider à prévenir le cancer, surtout le cancer de la prostate.7
CONCLUSION : Consommer une variété d’aliments frais et cuits constitue la meilleure option.
MYTHE : Les fruits et légumes frais sont toujours la meilleure option
Croquer dans une pomme mûrie à point cueillie directement d’un arbre est une expérience délicieuse, mais qui ne peut pas être facilement reproduite lorsque l’on achète des aliments à l’épicerie. Il est logique d’imaginer que les fruits et légumes frais sont plus sains que leurs homologues congelés; en comparant les aliments aux couleurs vives dans leur forme naturelle à ceux dans un sac en plastique dans le rayon des aliments congelés, il semble tellement évident que « frais » est préférable. Cependant, les fruits et légumes que vous achetez d’une épicerie ordinaire ou même d’une épicerie haut de gamme offrant des aliments biologiques ne sont souvent pas frais. Avant qu’ils arrivent à votre table, ils ont été cultivés, traités, emballés, expédiés et finalement placés à l’étalage de l’épicerie. Les fruits et légumes frais datent de nombreux jours ou de nombreuses semaines, selon leur type et l’endroit où ils sont cultivés, et ont perdu une certaine quantité de nutriments. Cela est loin de l’idée de la pomme fraîchement cueillie. Puisque les fruits et légumes doivent résister aux rigueurs du transport sans pourrir, les fermiers en font souvent leur récolte avant qu’ils soient prêts; ensuite, juste avant d’être vendus, ils sont pulvérisés d’un produit de mûrissement, composé de carbure de calcium ou d’un éthylène synthétique,1 qui produit une réaction simulant le processus naturel de mûrissement par l’éthylène normalement observé chez les fruits et légumes.
Bien sûr, si vous consommez des fruits et légumes qui proviennent de votre jardin ou directement d’un fermier local, ou qui ont une plus grande durée de conservation (tels que les légumes-racines), cette situation de s’applique pas.
Paradoxalement, les fruits et légumes destinés à la congélation sont habituellement cueillis lorsqu’ils sont parfaitement mûrs et congelés immédiatement. Cela signifie que les nutriments du produit congelé sont intacts et qu’il n’est pas nécessaire de les pulvériser d’un produit de mûrissement. De plus, ils coûtent souvent moins cher que leur équivalent frais.
Le processus est semblable pour les aliments en conserve, et étant donné que les boîtes de conserve ont une longue durée de conservation et ne doivent pas être gardées au froid pendant le transport, ce type d’aliment peut être un ajout peu coûteux au régime alimentaire.2 Assurez-vous cependant de choisir des fruits trempés dans de l’eau ou du jus plutôt que dans un sirop épais, et limitez or rincez les légumes ou haricots à haute teneur en sodium. Bien qu’il soit important d’être conscient des risques potentiels du BPA, la plupart des boîtes de conserve au Canada ne contiennent soit aucun BPA, ou contiennent des concentrations de BPA suffisamment faibles pour être jugées sûres par l’Agence canadienne d’inspection des aliments.3
Les fruits et légumes frais de l’épicerie constituent quand même un excellent choix. Cependant, vous n’avez pas à éviter les aliments congelés ou en conserve si cela convient à votre mode de vie ou aux plats que vous préparez. Les légumes congelés ou en conserve conviennent bien aux sautés et aux soupes, les fruits en conserve servent de collation rapide et facile, et vous pouvez ajouter des fruits congelés aux boissons frappées, aux produits de boulangerie et au gruau. Quel que soit leur état, la consommation d’une variété de fruits et légumes est importante.
CONCLUSION : Les fruits et légumes congelés et en conserve sont nutritifs et moins coûteux.
MYTHE : Manger certains aliments peut rendre le corps alcalin
Les partisans de ce que l’on appelle le « régime alcalin » ou le « régime de cendres alcalines » affirment qu’en consommant certains aliments le corps devient plus alcalin, favorisant ainsi une meilleure santé, tandis que d’autres aliments rendent le corps plus acide, entraînant la maladie. Cependant, leur définition d’alcalin n’est pas claire.
L’échelle du pH est utilisée pour décrire l’acidité de différents produits. Le vinaigre a un pH de 3, ce qui est très acide, l’eau pure a un pH de 7, ce qui est neutre et le bicarbonate de soude a un pH de 9, ce qui est alcalin (aussi appelé basique). Lorsque les gens parlent d’un régime alcalin ou d’aliments alcalins, ils ne font pas référence au pH des aliments eux-mêmes, mais plutôt à leurs comportements dans le corps. Lorsque le corps digère certains aliments, les résidus appelés « cendres » sont soit acides, soit alcalins, selon les aliments. L’idée est que ces cendres influencent le pH des différentes parties du corps, occasionnant des effets bénéfiques ou néfastes.
Le sang humain a toujours un pH de 7,35 à 7,45.8 Un sang plus acide indique un état de maladie grave appelé acidose qui, en l’absence de traitement, peut causer la mort. Un sang plus alcalin indique une alcalose, ce qui peut également être dangereux. D’autres endroits du corps ont une plus large plage de pH sécuritaire, mais le pH doit quand même demeurer à l’intérieur de cette plage. Par exemple, le pH de la peau se situe typiquement entre 4 et 7, mais celle-ci fonctionne mieux si son pH est inférieur à 5 (acide).9 Heureusement, notre corps accomplit un travail remarquable en gardant nos taux de pH équilibrés, sauf dans des circonstances extrêmes. En raison des définitions strictes de ce qu’est un pH santé, on peut imaginer comme il serait désastreux si les aliments que l’on consomme pouvaient facilement influer sur les niveaux de pH. Les reins, le foie et les poumons travaillent à éliminer tout composé dans le système qui pourrait avoir un effet sur le pH. Le pH de l’urine peut varier grandement selon ce que l’on mange puisque c’est en urinant que le corps élimine une grande quantité de déchets. Pour cette raison, certaines personnes surveillent le pH de leur urine et utilisent les résultats pour déterminer l’exactitude du régime de cendres alcalines, même si les résultats du pH de l’urine ne sont pas de nature à indiquer ce qui se passe dans le corps.10
Néanmoins, il est important de surveiller le pH en ce qui concerne votre bouche. Le jus de citron constitue un bon exemple, puisqu’il est souvent présenté comme un aliment alcalinisant. En fait, il n’a pas d’effet alcalinisant sur le corps et le citron lui-même est très acide, son pH étant de 2 à 2,5. Cela signifie que la consommation de jus de citron en grande quantité pour ses prétendus bienfaits d’alcalinisation peut potentiellement endommager vos dents en raison de l’acidité du citron.
Bon nombre des aliments considérés comme alcalins (notamment les légumes, les fruits et les légumineuses) sont des aliments très nutritifs qui sont bénéfiques à l’organisme de bien des façons sans toutefois avoir d’effet sur son pH. De nombreuses personnes qui entament un régime alcalin peuvent se sentir mieux, non pas en raison d’un effet d’alcalinisation, mais du fait que le régime les encourage à consommer plus d’aliments nourrissants et à réduire leur consommation d’aliments transformés. Cependant, à long terme, ce type de régime pourrait occasionner une carence en certains nutriments, tels que les acides gras essentiels.
CONCLUSION : Vous ne pouvez pas modifier le pH de votre corps par la consommation d’aliments précis.
MYTHE : L’acide phytique fait des céréales et légumineuses de pauvres choix alimentaires
Vous avez peut-être entendu dire que certains aliments tels que le blé et les haricots peuvent empêcher l’absorption de certains nutriments. Cela est dû à un composé du nom d’acide phytique que l’on retrouve dans la plupart des plantes, mais en quantités particulièrement élevées dans les céréales et les légumineuses. L’acide phytique fait obstacle à l’absorption de minéraux tels que le fer, le calcium, le manganèse et le zinc en se liant à eux avant que le corps n’ait eu la chance de les absorber.11
Les plantes emmagasinent le phosphore dans un composé appelé acide phytique. Comme il est mentionné ci-dessus, l’acide phytique peut se lier à d’autres minéraux, et ce faisant, crée des phytates. Notre corps ne possède pas les enzymes ayant la capacité de décomposer les phytates et il est donc incapable d’absorber ces nutriments.
En règle générale cependant, lorsque ces aliments atteignent notre assiette, ils ne contiennent plus assez de phytates pour occasionner des problèmes. Cela s’explique par le fait que la germination, la cuisson, la transformation, le trempage et le levage aident à détruire les phytates. Puisque nous ne consommons habituellement pas les céréales et les légumineuses de façon complètement crue et non transformée, lorsque ces aliments sont finalement consommés, la quantité de phytates qui reste est nettement plus faible. Qui plus est, l’acide phytique pourrait avoir des effets bénéfiques sur la santé en raison de ses propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes.12
La plupart de ces aliments contiennent toute une gamme de nutriments et de nombreuses personnes les consomment quotidiennement en toute sécurité. L’acide phytique a un impact sur la quantité totale de minéraux absorbés, mais une quantité suffisante est quand même absorbée. Ce n’est que le repas pendant lequel vous consommez ces aliments qui est touché; si vous mangez un dîner riche en phytates, cela n’aura aucune influence sur l’absorption des minéraux provenant de votre souper. Éviter la consommation de ces aliments parce que vous craignez réduire votre absorption de minéraux peut vouloir dire que vous manquerez de nombreux nutriments. Toutefois, si vous souffrez actuellement de carences en minéraux (fer ou zinc par exemple), vous voudrez peut-être limiter votre consommation d’acide phytique ou parler à un diététiste professionnel ou à votre médecin au sujet de vos préoccupations.
CONCLUSION : Oui, l’acide phytique peut se lier à d’autres minéraux, mais il n’empêche pas l’absorption de tous ces nutriments et peut en fait avoir des effets bénéfiques.
Amis et ennemis de l’absorption
Le corps a de la difficulté à absorber certains minéraux à moins qu’ils soient consommés avec d’autres types de nutriments. Si vous voulez augmenter l’absorption de calcium, consommez-le avec de la vitamine D.13 Si vous désirez absorber davantage de fer, le combiner avec de la vitamine C fonctionne bien.14
Les vitamines A, D, E et K sont liposolubles ce qui veut dire qu’elles ne peuvent pas être absorbées adéquatement à moins que des graisses alimentaires soient consommées en même temps.15
En revanche, certains composés rendent l’absorption de nutriments plus difficile. Les tanins, un type de composé végétal trouvé dans le thé, le café et le cacao, peuvent fortement inhiber l’absorption du fer.16