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Anémie ferriprive

Le mot anémie est dérivé du grec, signifiant sans sang. L’anémie est une affection caractérisée par une quantité de globules rouges insuffisante pour transporter l’oxygène à toutes les cellules et à tous les organes du corps. Les cellules sont incapables de fonctionner correctement lorsqu’elles manquent d’oxygène.

Les personnes atteintes d’anémie affirment souvent se sentir constamment fatiguées, bien que certaines ne remarquent pas la fatigue puisque celle-ci peut être légère ou peut se développer lentement en s’aggravant au fil du temps. L’anémie progresse avec la diminution du nombre de globules rouges qui fonctionnent correctement.

Environ 70 % du fer présent dans notre corps se trouve dans l’hémoglobine, une protéine contenue dans les globules rouges. Le fer est également un élément clé du tissu musculaire et un composant essentiel des mitochondries, l’usine énergétique de nos cellules.

Une anémie ferriprive se développe lorsque l’organisme ne dispose pas de suffisamment de fer pour produire l’hémoglobine, élément important des globules rouges qui leur donne leur couleur rouge.

Causes

Une carence en fer se produit lorsque l’organisme perd du fer en raison d’une perte de sang ou d’une hémorragie, de problèmes caractérisés par une absorption inadéquate de fer dans l’intestin ou d’une difficulté à fabriquer des globules rouges normaux.

Des raisons courantes de perte de sang pouvant occasionner une anémie ferriprive sont les règles abondantes, les saignements gastro-intestinaux (p. ex., ulcères d’estomac, hémorroïdes, calculs biliaires, maladie inflammatoire de l’intestin), les interventions chirurgicales, la grossesse, l’accouchement, les problèmes de thyroïde et les cancers.

Une mauvaise absorption du fer est une autre raison pouvant donner lieu à un faible taux de fer dans l’organisme. Elle peut résulter d’un régime pauvre en fer, de la maladie cœliaque, d’une chirurgie de perte de poids, d’une insuffisance cardiaque, d’une maladie rénale chronique, d’une maladie inflammatoire de l’intestin ou d’une affection du tissu conjonctif.

La difficulté à fabriquer des globules rouges normaux est une cause beaucoup moins fréquente d’anémie. Certaines personnes naissent avec une affection qui empêche la production normale d’hémoglobine, c’est-à-dire une hémoglobinopathie. Puisque leur corps fabrique des globules rouges dont la forme est différente et qui se décomposent plus rapidement, les analyses sanguines indiquent une anémie. D’autres personnes produisent difficilement des globules rouges parce que leur moelle osseuse ne fonctionne pas adéquatement ou parce qu’elles sont atteintes d’un grave problème rénal ou d’un cancer.

Les affections comme la maladie cœliaque, la maladie de Crohn, les infections parasitaires intestinales et la maladie du foie, peuvent entraver la capacité du corps à utiliser les nutriments provenant des aliments. Ces affections influent habituellement sur l’absorption, processus par lequel les nutriments traversent la paroi du tractus gastro-intestinal (GI) pour pénétrer dans la circulation sanguine. Lorsqu’une perturbation ou des dommages à la muqueuse du tractus GI se produisent, comme dans le cadre des maladies mentionnées ci-dessus, la capacité du corps à absorber bon nombre de nutriments (comme le fer) est réduite. C’est ce que l’on appelle la malabsorption. En absence d’une quantité suffisante de fer, le corps a de la difficulté à former des globules rouges en quantité suffisante ou correctement, entraînant une déficience de la partie du sang riche en fer (hémoglobine). Il en résulte une anémie ferriprive, la forme d’anémie la plus répandue dans le monde et représentant 50 % des cas.

Tableau 1 : Causes de l’anémie ferriprive

Malabsorption

  • maladie cœliaque
  • maladie de Crohn
  • diverticulose colique
  • hernie hiatale
  • hépatite chronique et affections hépatiques
  • gastrectomie antérieure
  • chirurgies de perte de poids
  • achlorhydrie et hypergastrinémie (utilisation fréquente d’antiacides ou d’inhibiteurs de la pompe à protons)
  • infection à Helicobacter pylori
  • maladie rare se produisant lorsqu’une protéine anormale, appelée amyloïde, s’accumule dans les organes et fait obstacle à leur fonctionnement normal (amyloïdose)
  • autres types d’affections GI ayant endommagé ou compromis les sites d’absorption
  • maladies chroniques liées à l’inflammation (p. ex., affections rhumatologiques, insuffisance cardiaque, maladies du rein chroniques, dans une certaine mesure)
  • médicaments (p. ex., metformine, inhibiteurs de la pompe à protons)
  • cancer

Perte de fer

  • maladie inflammatoire de l’intestin (maladie de Crohn, colite ulcéreuse, proctite ulcéreuse)
  • règles abondantes (ménorragie)
  • hémorroïdes
  • ulcère (gastrique, duodénal, de Cameron)
  • certains types de polypes coliques ou gastriques
  • chirurgie
  • accouchement
  • cancer (gastrique, œsophagien, de l’intestin grêle, colique)
  • gastrite, œsophagite
  • saignements aigus du tractus gastro-intestinal supérieur
  • utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène, le naproxène et l’Aspirin®, qui peuvent causer des hémorragies internes
  • infections parasitaires (ankylostome)
  • anomalies vasculaires (angiodysplasie, ectasie vasculaire gastrique antrale, angiomatose hémorragique familiale)
  • saignements de nez récurrents (épistaxis)
  • perte de sang urinaire
  • dégradation anormale des globules rouges (hémolyse intravasculaire chronique)
  • dons de sang réguliers, phlébotomie

Demande accrue en fer

  • adolescence
  • menstruation
  • grossesse
  • allaitement ou lactation
  • traitement à l’érythropoïétine

Apport alimentaire insuffisant

Symptômes et complications

Les personnes souffrant d’anémie ferriprive peuvent fréquemment connaître des étourdissements, une fatigue extrême, des maux de tête, un essoufflement, une lassitude et une faiblesse musculaire. D’autres signes et symptômes moins courants d’une anémie comprennent une pâleur extrême, des ongles cassants, des mains et des pieds froids, le syndrome des jambes sans repos, un risque accru d’infection, une dépression et l’envie de manger des substances non alimentaires (pica) comme de la glace et de la terre, ou un manque d’appétit surtout chez les nourrissons et les enfants.

Si la carence en fer n’est pas traitée, elle peut entraîner des complications alors que le corps compense le manque de fer et d’oxygène au moyen d’une fréquence cardiaque rapide ou irrégulière, étant donné que le cœur doit pomper davantage de sang, et d’une respiration rapide. Les enfants à naître peuvent aussi être touchés; l’on a signalé des naissances prématurées et un faible poids à la naissance chez les bébés dont la mère souffrait d’une grave anémie ferriprive, ainsi que des retards de croissance et de développement permanents.

Signes et symptômes de l’anémie ferriprive

  • fatigue ou lassitude
  • essoufflement
  • faiblesse
  • étourdissements ou sensation de tête légère
  • maux de tête
  • douleur de la langue
  • pâleur de la peau
  • douleurs à la poitrine, battements cardiaques rapides
  • mains et pieds froids
  • ongles cassants
  • syndrome des jambes sans repos
  • risque accru d’infection
  • dépression
  • perte d’appétit (souvent chez les jeunes enfants et les nourrissons)
  • envie pour des substances non alimentaires (pica)

Diagnostic

Une fatigue générale, une lassitude, une pâleur de la peau et un essoufflement poussent la plupart des personnes atteintes d’une anémie non diagnostiquée à consulter leur médecin. Pour diagnostiquer une anémie ferriprive, votre médecin évaluera vos symptômes et vous demandera probablement de fournir des échantillons à des fins d’analyse en laboratoire. Habituellement, un échantillon de sang est requis pour mesurer les réserves de fer et évaluer la taille, la couleur et la quantité des globules rouges, y compris leurs taux d’hémoglobine; un échantillon de selles pourrait être requis pour vérifier si vous perdez du sang (et du fer).

Typiquement, le taux d’hémoglobine, le pourcentage du sang constitué de globules rouges (hématocrite) et la quantité d’une protéine indicatrice de la réserve de fer dans le corps (ferritine) sont généralement faibles si vous souffrez d’une anémie ferriprive. Si votre médecin soupçonne une malabsorption, vous devrez peut-être subir d’autres tests, y compris une échographie, une endoscopie et une coloscopie, permettant à votre médecin de visualiser tout changement dans l’abdomen et dans le tractus digestif pouvant être à l’origine d’une malabsorption. Celle-ci est une cause fréquente d’une carence en fer chez les personnes souffrant d’une maladie digestive, en particulier lorsque le fer n’est pas facilement absorbé par l’organisme. La consommation de café, de thé ou de suppléments de calcium avec les repas peut également réduire l’absorption du fer.

Gestion

Prévention

Les recommandations canadiennes en matière d’apport adéquat en fer varient en fonction de l’âge, du sexe et de la grossesse ou de l’allaitement chez les femmes. Chez les nourrissons et les enfants âgés de 7 mois à 8 ans, l’on recommande un apport de 7 à 11 mg de fer par jour. En général, le sexe masculin de plus de 9 ans doit en consommer 8 mg par jour, bien que 11 mg par jour soit recommandé pendant la période de croissance et développement entre les âges de 14 à 18 ans. Pour le sexe féminin, l’apport quotidien recommandé est de 8 à 15 mg entre 9 et 18 ans, de 18 mg entre 19 et 50 ans et de 8 mg à partir de 51 ans. Pendant la grossesse, l’apport recommandé passe à 27 mg par jour. Ces recommandations s’appliquent aux personnes qui n’ont pas de problèmes d’absorption ni d’autres affections ayant un effet sur le fer dans l’organisme.

Modifications à l’alimentation

Bon nombre de personnes souffrant d’anémie ferriprive devront prendre des suppléments afin d’adéquatement augmenter leur réserve de fer et d’améliorer la quantité et la qualité de leurs globules rouges. Cependant, il peut quand même être bénéfique de consommer des aliments riches en fer (Consultez le guide alimentaire canadien pour une liste d’aliments).

Il existe deux types de fer absorbable : le fer hémique et le fer non hémique. Le fer hémique, provenant de l’hémoglobine et de la myoglobine d’origine animale comme la viande, les fruits de mer et poissons, et la volaille, est plus facilement absorbé. Les mollusques et crustacés, le foie et la viande rouge sont de très bonnes sources de fer hémique, mais la plupart des viandes, des fruits de mer et poissons, et les œufs constituent de bonnes options.

Le fer non hémique, provenant de plantes et retrouvé dans les aliments enrichis de fer et dans la plupart des suppléments de fer, est moins bien absorbé. Les haricots, les lentilles, le tofu, les épinards, les grains enrichis, les noix et les graines, et la mélasse de cuisine sont une bonne source de fer non hémique. Vous pouvez augmenter la quantité de fer non hémique que votre corps absorbe en mariant des aliments riches en fer à ceux riches en vitamine C, ou en prenant de la vitamine C avec les repas pour aider le corps à absorber le fer présent dans les aliments. Pour en savoir plus sur l’augmentation de votre taux de fer par l’alimentation, consultez un diététiste professionnel.

Suppléments oraux de fer

La prise de fer sous forme de comprimés oraux est la façon la plus simple et la plus accessible de reconstituer les réserves de fer. Il existe toute une variété de suppléments de fer disponibles sans ordonnance. Les suppléments à dose plus élevée peuvent être obtenus en s’adressant à votre pharmacien.

Pour parvenir à un équilibre optimal entre une dose élevée de fer étant bien absorbée et des effets secondaires minimes, certains experts recommandent une prise maximale de 100 mg de fer élémentaire par jour ou de 200 mg tous les deux jours. Dans certains cas, votre professionnel de la santé pourrait recommander une dose plus élevée qui pourrait être bien tolérée. La quantité de fer élémentaire dans les sels de fer varie. Par exemple, le fumarate ferreux en contient 33 %, le sulfate ferreux 20 % et le gluconate ferreux 12 %. Selon la formulation, les doses élevées peuvent ne pas être absorbées complètement en provoquant tout de même des effets secondaires (p. ex., constipation, malaises d’estomac, nausées, vomissements, selles foncées).

En plus des sels de fer courants, il existe d’autres formes de suppléments de fer oraux. Ils comprennent le polypeptide de fer hémique (p. ex., Proferrin®), le complexe polysaccaride-fer (p. ex., FeraMAX®, un complexe polydextrose-fer) et le fer conçu pour être acheminé par des liposomes ou des phospholipides (p. ex., le fer LCE Liposomal™ Ferosom Forte et le fer Sucrosomial®), lesquels gagnent en popularité et offrent d’autres options pour normaliser les niveaux de fer. Ces nouvelles formulations de suppléments de fer peuvent améliorer l’absorption et causer moins d’effets secondaires que les sels de fer traditionnels. Certains de ces produits sont offerts sous forme de poudre aromatisée à diluer et à boire, ou sous forme de comprimés aromatisés à croquer. Discutez des options, y compris la dose, avec votre pharmacien pour trouver le produit qui convient le mieux selon vos préférences et vos besoins individuels. Les suppléments les mieux absorbés permettront une normalisation plus rapide des taux de fer, habituellement dans l’espace de trois à six mois.

Quelques mises en garde

L’abondance de suppléments de fer disponibles sur les sites de vente en ligne, dans les magasins d’aliments naturels, etc, est à l’origine de diverses allégations commerciales. Les suppléments ayant fait l’objet d’études cliniques, les produits de qualité et les fabricants fiables sont les plus dignes de confiance — votre pharmacien ou votre médecin sont les sources d’information les plus fiables à cet égard. Bien que vous pourriez ressentir moins d’effets secondaires avec un certain produit comparativement à un autre, assurez-vous que ceux-ci fournissent des quantités comparables de fer élémentaire. Les produits à plus faible dose sont moins susceptibles d’occasionner des effets indésirables qu’un produit dont la teneur en fer élémentaire est plus élevée.

Parmi les effets secondaires courants des suppléments de fer à prise orale, citons les maux d’estomac, les selles noires, la constipation, les nausées, ainsi que les taches dentaires provoquées par l’utilisation continue de produits de fer liquides.

Perfusion de fer par voie intraveineuse (IV)

Il est impossible pour certaines personnes d’absorber la quantité de fer souhaitée par l’entremise du tube digestif en raison de contraintes de temps (p. ex., intervention chirurgicale, grossesse, accouchement), d’une affection de malabsorption, d’une affection inflammatoire (p. ex., maladie de Crohn, colite ulcéreuse), d’une insuffisance cardiaque, d’une maladie rénale chronique, d’un cancer ou d’effets secondaires intolérables liés à la prise de fer par voie orale. Les personnes ayant subi des pertes de sang importantes ou celles dont les niveaux de fer sont très bas peuvent avoir besoin de fer par voie IV pour reconstituer leurs réserves plus rapidement qu’avec les préparations orales.

L’administration de doses élevées par voie IV est l’option la plus efficace pour les personnes qui se classent dans de telles catégories puisqu’elle peut fournir de façon plus rapide une grande quantité de fer à l’organisme sans nécessiter son absorption dans l’intestin. Les personnes qui reçoivent du fer par voie IV connaissent une atténuation plus rapide de leurs symptômes (c.-à-d. en quelques jours ou semaines) et ressentent souvent un soulagement immédiat des symptômes occasionnés par l’anémie, bien que des mesures en laboratoire doivent être effectuées de 4 à 6 semaines suivant la perfusion.

Cependant, l’un des désavantages qui accompagnent l’administration du fer par voie IV est la perfusion elle-même et les effets secondaires qui l’accompagnent. Occasionnellement, il peut y avoir un changement dans la coloration de la peau ou des veines (qui peut s’estomper lentement sur plus de 6 mois), de légères douleurs dans les jours qui suivent la perfusion, une pseudoallergie (c.-à-d. des contractions musculaires, des rougeurs), une hypotension artérielle ou un rare risque de réaction allergique ou anaphylactique grave (moins de 1 personne sur 200 000), qui est un risque théorique lié à tous les médicaments administrés par voie IV.

Les plus anciens produits à base de fer à administration IV, p. ex., le complexe de gluconate ferrique de sodium (Ferrlecit®) et le fer-saccharose (Venofer®), nécessitent généralement plusieurs (trois ou plus) perfusions de plus longue durée (de 2 ou 3 heures) toutes les 4 à 6 semaines.

Le dérisomaltose ferrique (Monoferric®), une plus récente préparation intraveineuse à base de fer, approuvée par Santé Canada pour le traitement de l’anémie ferriprive chez les adultes qui présentent une intolérance ou une absence de réponse à la thérapie ferrique orale, peut être administré en doses plus élevées. Ce produit requiert généralement une perfusion d’une durée de 30 minutes, se traduisant par une augmentation plus rapide du taux d’hémoglobine sans toutefois aggraver les effets secondaires. Les professionnels de la santé formés pour gérer les effets secondaires et les réactions allergiques connexes qui pourraient survenir, administrent typiquement les perfusions de fer en clinique de consultation externe dans un hôpital ou dans une clinique de perfusion privée. Étant donné que la plupart des réactions se produisent dans les 30 minutes suivant la perfusion, on pourrait vous demander de rester dans l’aire de soins aux patients après votre perfusion.

Un nombre réduit de perfusions de fer dont la durée est raccourcie pourrait potentiellement réduire la fréquence des effets secondaires et réduire les coûts liés à l’administration IV. Malheureusement, les préparations de fer IV à faible dose contiennent rarement suffisamment de fer pour atteindre cet objectif. L’utilisation de fer par voie IV permet une reconstitution plus immédiate des réserves de fer dans l’organisme que les suppléments oraux, mais il faudra tout de même un certain temps pour que l’organisme utilise le fer pour fabriquer des globules rouges. Chez certaines personnes, l’administration d’un complément oral efficace après la recharge en fer par voie IV permet d’éviter ou de retarder un nouvel épisode d’anémie ferriprive.

L’avenir

Quoique nous ne puissions pas toujours corriger la malabsorption, l’anémie ferriprive qui en résulte peut être traitée afin de gérer les symptômes connexes. Des études sont en cours pour identifier de nouveaux agents qui sont mieux absorbés par voie orale, ainsi que des versions IV plus pratiques à administrer et mieux tolérées. Il pourrait être bénéfique de rendre le fer IV plus accessible puisque les médecins le reconnaissent comme une solution de rechange plus efficace aux suppléments oraux chez certains patients.